Oise : le Canal Seine-Nord Europe aide au reboisement des forêts

La Société du Canal Seine-Nord Europe a retenu 22 dossiers lors de son appel à projets pour financer des boisements ou des reboisements de bois privés de la région, dans le cadre de mesures de compensation de défrichements, prévus pour la construction du canal. Un travail de concertation avec Fransylva Hauts-de-France et Nord Seine Forêt, qui répond à l'urgence du renouvellement forestier du territoire et d'une gestion durable.

À Margny-aux-Cerises, 8 ha ont été reboisés.
À Margny-aux-Cerises, 8 ha ont été reboisés.

Important et impactant, le volet environnemental prend une grande place au sein du futur Canal Seine-Nord Europe. Si le projet s'inscrit dans la démarche ERC - consistant à éviter ou réduire au maximum les impacts sur l'environnement - il doit légalement, quand ce n'est pas possible, mettre en place des mesures de compensations environnementales, qu'elles soient économiques ou écologiques.

Et l'enjeu est de taille pour la Société du Canal Seine-Nord Europe : les travaux de compensation environnementale sur l'ensemble du tracé du canal représentent plus de 1 100 hectares.

Des compensations écologiques et économiqes

Lancés en décembre 2019 et février 2022, les appels à projets pour les « compensations défrichement » - en partenariat avec Fransylva Hauts-de-France, la fédération des syndicats de forestiers privés de la région - ont pour but de financer des boisements ou des reboisements de bois privés de la région. Au total, 22 propriétaires de l'Oise, la Somme, le Nord et le Pas-de-Calais ont été sélectionnés et s'engagent sur une gestion durable de 15 ans. L'enjeu ? Le carbone forestier. « Les forêts agissent soit comme sources soit comme puits de dioxyde de carbone. Le reboisement est essentiel pour lutter contre le réchauffement climatique », explique Pierre Ducray, directeur de la coopérative Nord Seine Forêt, qui travaille de concert avec la SCSNE et les propriétaires privés. Dans l'Oise, des projets à Caisnes, Carlepont ou encore Élincourt-Sainte-Marguerite sont concernés.

Installations de mares, de prairies humides, ou boisements secs, plantations de haies, frayères à brochet, boisement... les compensations dépendent du contexte écologique du milieu naturel impacté et chaque projet est construit cas par cas. « Il y a des compensations écologiques qui sont effectuées proches du canal, jusqu'à 5 km du futur tracé, précise Antoine Lefrancq, responsable des travaux environnementaux à la SCSNE. Et les compensations économiques s'effectuent à l'échelle du département. » Si la SCSNE finance des projets de boisement ou reboisement, elle a mené elle-même des opérations de boisements. Comme à Chiry-Ourcamp, commune à proximité du futur canal, où 6 500 plants sur une parcelle de 5,4 hectares ont été repiqués et 2 400 plants de l'Orme lisse, une espèce rare et protégée en Picardie, plantés, en partenariat avec le Conservatoire Botanique National de Bailleul et le Lycée horticole de Ribécourt.

Dynamiser la filière bois régionale

Dans le cadre de ces appels à projets, la Société du Canal Seine-Nord Europe s'associe à la filière sylvicole des Hauts-de-France. Un exemple de ce partenariat s'est concrétisé dans le noyonnais, à Margny-aux-Cerises, une petite commune au nord de Noyon, qui se situera à l'horizon 2030, à 5 km du futur du canal. Sur une parcelle à l'abandon de 8 ha, 6 ha de résineux (7 468 pins Douglas) et 2 ha d'arbres (2 832 chênes et 284 alisiers des bois) ont été plantés, après une analyse des sols, à la faveur d'une compensation économique d'un côté (les pins seront utilisés pour le bois), et écologique de l'autre (les chênes favorisent la biodiversité). Un reboisement était nécessaire sur cette parcelle, où hêtres et merisiers ont du être abattus, malades et non exploités depuis plus de dix ans, « et sans plus aucune valeur économique », note Jean-François Nancelle, l’un des 12 copropriétaires de la forêt familiale.

Exploitée depuis 25 ans, cette forêt familiale était en impasse sylvicole.

Si les propriétaires privés de forêts doivent s'occuper des parcelles qu'ils possèdent, ils n'y sont plus tenus quand les forêts deviennent "mortes" dont le reboisement devient trop cher. « Ici, nous étions dans une impasse sylvicole, constate Marie Pillon, déléguée générale en Hauts-de-France de Fransylva. La chalarose et la rouille ont envahi la parcelle, et la régénération naturelle de la forêt n'était plus possible. Nous ne pouvons plus que constater. » Et les forêts à l'abandon « stockent moins de carbone », précise le directeur de la coopérative Nord Seine Forêt.

Et ce cas n'est pas isolé. Les forêts des Hauts-de-France font face au réchauffement climatique, aux maladies et au vieillissement des arbres... le renouvellement des peuplements et la régénération des impasses sylvicoles représentent donc des enjeux majeurs pour préserver le premier réservoir de la biodiversité terrestre mais aussi pour dynamiser la filière bois des Hauts-de-France. Avec 73% des surfaces boisées appartenant à des propriétaires privés (soit près de 320 000 ha), 42 000 emplois et plus de 170 000 m3 de bois commercialisés par an par Nord Seine Forêt, l'intérêt économique de cette filière demeure. « Le but est de trouver les essences les plus adaptées, mais aussi la bonne provenance des plants car il s’agissait là aussi d’un critère de l’appel à projets, note Pierre Ducray. La valeur du pin Douglas était évidente dans ce reboisement d’intérêt économique. Il y a très peu de plantations dans la région. »

Le pin Douglas, ce conifère qui devient géant apprécié en France pour son bois, est capable de rivaliser avec les plus grands séquoias d'Amérique du Nord.

Une filière en pleine évolution aidée par la Société du Canal Seine-Nord Europe. Aujourd'hui au stade d'arbrisseaux, les espèces actuellement plantées seront arbres en 2 100. Si les évolutions climatiques ne peuvent être prédites, l'objectif pour ces partenaires est d'instaurer une gestion durable des forêts... et de créer une boucle vertueuse où se conjuguent économie et écologie.