2022 : l'Insee prévoit une croissance d'un niveau pré-covid
En 2022, l'économie française devrait retrouver un niveau de croissance comparable à celui des années pré-covid, et le chômage continuer à baisser, d'après l'Insee. Mais ces projections demeurent encore soumises à un contexte géopolitique imprévisible.
« Guerre et prix » : c'est l'intitulé choisi par l'Institut national de la statistique et des études économiques, pour présenter ses prévisions de l'année 2022, lors d'une conférence de presse en ligne, fin juin. Ces prévisions s'inscrivent dans un « contexte de chocs inédits » de nature géopolitique et sanitaire, rappelait Julien Pouget, chef du département de la conjoncture à l'Insee. Au premier trimestre de cette année et au printemps, le Covid 19 a impacté les économies française et chinoise, choc auquel se sont ajoutés les contrecoups de la guerre en Ukraine, à partir de fin février. Ces phénomènes ont amplifié les tensions préexistantes sur les prix et les approvisionnements. « Les politiques économiques sont face à de nouveaux défis. Au cœur de la crise liée au Covid, la politique monétaire a été très accommodante et les soutiens budgétaires massifs. On s'inquiétait du manque d'inflation. Aujourd'hui, la situation de très vive inflation conduit à des resserrements monétaires qui peuvent peser sur les comportements. Les politiques budgétaires essaient de limiter l'impact de inflation en limitant les prix ou en soutenant les revenus », décrypte Julien Pouget. Les courbes de l'inflation, très vives, présentent des écarts manifestes selon les pays.
Le phénomène est particulièrement fort aux États-Unis, où la relance budgétaire a été massive, et où les retraits sur le marché du travail ont induit une augmentation des salaires. Pour l'Europe, l'inflation en France est plus limitée, notamment grâce au bouclier tarifaire sur le gaz et l'électricité mis en place par le gouvernement .
Pour la deuxième partie de l'année, l'Insee mise sur un « rebond du commerce mondial », sous l’effet de la reprise en Chine, après l'épisode du confinement du printemps. Les économies américaine et européenne resteraient portées par leur demande intérieure, moins dynamique toutefois. En particulier, la zone euro devrait connaître une croissance modérée : « elle est plus exposée à la crise ukrainienne, mais son potentiel de rattrapage est plus important », explique Julien Pouget. Le scénario s'entend sous réserve d'un nouveau choc lié à des ruptures d'approvisionnement brutales de la Russie, par exemple, ou de nouveaux confinements chinois.
Baisse du pouvoir d'achat
En France, « la confiance des ménages apparaît relativement affaiblie. Contrairement aux scrutin présidentiel précédent, nous n'avons pas connu de regain de confiance », note Julien Pouget. C'est ce qui se dégage des enquêtes de conjoncture de l'Insee de juin, qui montrent que les Français sont plus nombreux à juger opportun d'épargner plutôt que de réaliser des achats importants.
Côté entreprises, le climat des affaires s’affiche en « demi-teinte ». Affecté depuis le début de la guerre en Ukraine, celui du commerce de détail reste inférieur à la moyenne de longue période. Les services sont moins touchés. Et le climat des affaires dans l'industrie garde une « relativement bonne tenue », même si les problèmes d'approvisionnement restent à un niveau historique élevé.
Au total, c'est donc le tableau d'une croissance modérée et d'une inflation forte qui se dessine. Cette dernière devrait atteindre 5,5% sur l'année 2022, atteignant un pic de 7% en septembre, avant de redescendre. Sans le bouclier tarifaire, elle serait de deux points plus élevée. La croissance qui s'est affaiblie en début d'année, devrait se poursuivre pour atteindre 2,3% sur l'année : après 0,2% au deuxième trimestre, elle devrait atteindre 0,3% sur chacun des deux suivants. « Ce niveau reste en deçà de ce que l'on aurait pu atteindre en reprise post-covid, mais il n'est pas très éloigné des niveaux avant-covid », commente Julien Pouget. Dans le même sens, l'emploi salarié de devrait se maintenir, avec la création de 260 000 postes et un taux de chômage de 7% pour 2022. La croissance de l'activité devrait se baser essentiellement sur celle des services, et en particulier de l'hébergement et de la restauration. Le commerce, lui, resterait atone et l'industrie et la construction, devraient connaître un rebond modeste.
Autre évolution prévue par l'Insee, le pouvoir d'achat devrait diminuer de 1% sur l'année. En effet, le revenu disponible augmenterait de 4,1%, en raison du dynamisme des salaires, ajouté aux mesures publiques de soutien, telles que la revalorisation du point d'indice de la fonction publique, la revalorisation de 4 % des retraites et des minima sociaux, la suppression de l'audiovisuel publique, la prime Macron. L'Insee se base sur des annonces publiques qui devront être confirmées. Quoi qu'il en soit, cette augmentation du revenu disponible resterait inférieure à celle des prix sur l'année (+6,8% ).