Industrie
À Venette, le site Bionext participe à la production de biocarburant avancé grâce à la biomasse
C'est une première mondiale : le projet BioTfueL®, lancé en 2010, a terminé d'être testé fin juin et a été approuvé après avoir été validé et optimisé sur les sites Bionext à Venette et Dunkerque. L'objectif ? Fabriquer du biocarburant avancé (de 2e génération) à base de biomasse (paille et bois) pour les secteurs de l'aérien. Porté par des partenaires et industriels européens, ce projet est prêt à être industrialisé à plus grande échelle et préfigure la bioraffinerie de demain.
C'est une grande avancée pour la filière de biocarburants de 2e génération. Il aura fallu onze ans pour approuver le projet de démonstration BioTfuel®, une technologie de pointe permettant de fabriquer du biocarburant de 2e génération – notamment du biokérosène - à partir de biomasse produites à base de résidus agricoles et forestiers. Ce projet a été en démonstration (de 2019 à 2021) afin de tester la viabilité de sa production et de son environnement (chaîne complète, transports, logistique, etc.) sur les sites industriels de Bionext à Venette (60) et à Dunkerque (59). Le premier accueille l'unité de torréfaction de la biomasse, il est également situé sur le site industriel du partenaire Avril. Le second – mis à disposition par TotalEnergies - gazéifie cette biomasse torréfiée avant de synthétiser les biocarburants liquides. L'opération de ces unités de démonstration a permis de prouver avec succès la technologie BioTfuel®. Et l'enjeu est majeur et impressionnant : cette technologie permet de réduire des émissions de gaz à effet de serre de plus de 90% !
Une technologie qui rentre dans le cadre du rapport gouvernemental visant notamment à éclairer la représentation nationale sur la possibilité d'atteindre un niveau de production suffisant pour permettre l'obligation d'incorporation de 1% de biocarburants de nouvelle génération pour les carburéacteurs aéronautiques au 1er janvier 2022. « La décarbonation est nécessaire pour la transition énergétique », rappelle-t-on chez Bionext. Car le biocarburant avancé 2e génération représente la voie du thermo-chimique où l'hydrogène est essentiel, un gaz qui double la production du biocarburant avancé.
Une économie circulaire
Concrètement, le projet BioTfuel® est basé sur un concept novateur reposant sur sa capacité à traiter la plus large diversité possible de biomasse, constituée de déchets forestiers (feuillus, bois dur ou tendre), de résidus agricoles (paille), pour l'essentiel. Cette flexibilité permettra de garantir la continuité de l'approvisionnement des futurs unités industrielles tout en réduisant le coût de production. Et les sites industriels sont un véritable bijou de technologie. Quatre étapes sont nécessaires à la fabrication du biocarburant avancé à partir de la biomasse : le pré-taitement par torréfaction de la biomasse, la gazéification, la purification et la synthétisation Fisher-Tropsch. « La technologie de torréfaction (thyssenkrupp Industrial Solutions) consiste en un séchage poussé de la biomasse qui est chauffée quelques minutes à plus de 250°C en l’absence d’oxygène et qui en ressort friable et imputrescible et densifiée énergétiquement. Ensuite, la biomasse torréfiée est ensuite transportée sur le site de Dunkerque pour être gazéifiée », précise Sébastien Gonnard, responsable de l’unité de torréfaction. Des étapes effectuées dans les Hauts-de-France, entre Venette et Dunkerque où se trouve également la matière première. « L'idée est d'être au plus près de la matière première et des ressources pour créer une économie circulaire », précise-t-on encore chez Bionext.
Si
la région des Hauts-de-France s'inscrit, encore une fois, dans la
troisième révolution industrielle avec ce projet révolutionnaire,
le projet BioTfuel®
est porté, au sein de l'entreprise Bionext, par des partenaires
européens leaders dan leurs secteurs ainsi que des organismes de
recherche (IFP Energies nouvelles et CEA) et des industries (Axens,
Avril, TotalEnergies et l'allemand Thyssenkrupp. Ces partenariats
représentent un réel atout pour le développement de BioTfuel®
au niveau mondial... pouvant même propulser la France en leader
mondial dans ce domaine. « La
technologie BioTfueL® peut également évoluer en fonction des
conditions et des opportunités du marché. Par exemple, un
approvisionnement externe en hydrogène permet d’améliorer de
façon significative le rendement global de la chaîne. Cette
solution permet de plus d’envisager l’introduction d’hydrogène
vert dans les transports sous forme de e-Biofuels en s’affranchissant
des difficultés de manipulation, de stockage et d’utilisation de
l’hydrogène pur dans les transports en général et pour les
aéronefs en particulier (le carbone de la biomasse constituant alors
le stockage de l’hydrogène », explique Jean-Pierre Héraud, ingénieur
développement des procédés de production. Au total, 180 millions d'euros dont 33,2
millions de financement public (Ademe, Région Hauts-de-France,
Feder) ont été nécessaires pour mettre en place les sites de
démonstration.
Vers l'industrialisation
Après la phase de démonstration, l'heure est à l'industrialisation et la future commercialisation. Alors que les sites produisent actuellement 2 tonnes de biocarburant avancé par heure, l'objectif est d'en produire de 50 à 200 000 tonnes par an. Bionext en appelle au Gouvernement pour cette étape cruciale. « La démonstration est finie, l'heure est à la confiance pour passer à l'étape de l'industrialisation et l'aide de l’État est nécessaire », a rappelé l'équipe de l'industrie au ministre des Transports, Jean-Baptiste Djebbari, venu visiter le site de Venette, le 27 juillet. « Cette première démonstration est la preuve que l'enjeu de faire de la France le leader mondial dans ce domaine est possible, a confié le ministre. L'idée est d'aller le plus vite possible pour intégrer le biocarburant dans le secteur aérien. »
Lors
de cette visite, le ministre a annoncé la mise en place d'un Appel à projets de 200
millions d'euros à destination des projets de décarbonation. Un
premier appel sera lancé le 15 octobre, pour une secondé étape
prévue à l'été 2022.
La technologie des fours
« La chaleur
nécessaire au séchage et à la torréfaction est amenée dans les
fours via un flux de gaz chauds. Les fumées
de combustion chaudes sont utilisées pour chauffer le sécheur via
un échangeur de chaleur. Cette intégration thermique permet, dans
la plupart des cas, d’être autosuffisant en énergie et donc de ne
pas utiliser d’appoint de combustible », explique encore Jean-Pierre Héraud, ingénieur
développement des procédés de production.