Architecte des Bâtiments de France : protecteur du patrimoine
Architecte des bâtiments de France ( ABF) est un métier aux multiples responsabilités, incontournable pour tout grands projets touchant à l'urbanisme, à l'architecture ou au patrimoine. Il reste pourtant nébuleux aux yeux de la population. Christian Douale, ABF au sein du Service territorial de l'architecture et du patrimoine (STAP) de la Somme, dévoile à Picardie la Gazette les coulisses de son métier.
Picardie La Gazette : Qu’est-ce qu’un ABF ?
Christian Douale : Les ABF sont des fonctionnaires appartenant au corps des Architectes et urbanistes de l’Etat (AUE). Ils exercent leurs fonctions dans un département, au sein des STAP, rattachés aux Directions régionales des affaires culturelles ( DRAC), relevant du ministère de la culture et de la communication. Les ABF ont trois missions de service public touchant au domaine du patrimoine architectural, urbain et paysager : la conservation, le conseil et le contrôle.
PLG : Qu’entendez-vous par conservation, conseil et contrôle ?
C.D : La conservation est ma mission la plus patrimoniale. Sur le département de la Somme, il y a 400 Monuments historiques. Je donne des avis techniques sur ces derniers, et peut établir des bilans sanitaires sur un monument qui me paraît mal protégé. Je suis également force de proposition lors des commissions décidant du classement de nouveaux monuments historiques.
Ma mission de conseil concerne quant à elle, les domaines de l’architecture, du patrimoine et de l’urbanisme. Je donne après étude des projets, un certain nombres de préconisations aux particuliers, aux collectivités ou aux autres services de l’État. Enfin, ma mission de contrôle consiste à vérifier que les règlements et les projets sont conformes à la législation en vigueur selon les quatre grandes catégories de protection existantes. Pour tous projets, je dois ainsi délivrer un avis conforme, c’est-à-dire qui doit être suivi par le demandeur, ou simple, c’est-à-dire qu’il peut être pris en compte ou rejeté par le demandeur. Je donne des avis dits conformes sur les secteurs sauvegardés (un seul dans la Somme à Mers-les-Bains), sur les Aires de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine ou AVAP (anciennement Zone de protection du patrimoine, architectural, urbain et paysager – ZPPAUP), sur les abords des monuments historiques (zone avec un rayon de 500 mètres autour d’un Monument historique), ainsi que sur les sites classés. Pour les sites inscrits, je délivre un avis dit simple sur toutes les demandes sauf les permis de démolition.
PLG : Si un particulier doit s’adresser à vous, que lui conseillez-vous ?
C.D : « Nous traitons 3 500 dossiers par an dans le service STAP de la Somme qui ne compte que 7 salariés : trois membres du personnel administratif, trois techniciens et moi-même ; sachant que je suis le seul habilité à pouvoir donner l’avis final et signer les documents. Nous essayons de répondre à toutes les demandes, mais pour aller plus vite je conseille de s’y prendre le plus tôt possible en amont du projet.
PLG : Certains ne comprennent pas les contraintes imposées autour du bâti ancien ou de sites protégés. Pourquoi de telles mesures ?
C.D : Il est vrai que les prescriptions sur le bâti ancien ou sur certains sites peuvent paraître exigeantes. Tout d’abord, il y a biensûr une législation à respecter. Néanmoins, à part dans certains cas tels les secteurs classés qui sont inconstructibles, les prescriptions et donc les contraintes diffèrent selon le projet. Les objectifs ne sont pas seulement de protéger le patrimoine. Le but n’est pas de le mettre sous cloche. Il s’agit avant tout de conserver la qualité du site. Dans une commune, cela peut amener une valeur ajoutée pour le tourisme, ce qui est une source non négligeable pour l’économie locale. Pour le particulier, même si l’engagement financier de départ peut être conséquent, si les choses sont faites correctement, il y a un retour d’investissement. Une demeure historique entretenue, se vendra beaucoup mieux et à prix beaucoup plus élevée.