« Il faut sauver Chantilly et sa forêt ! »
Réchauffement climatique ? Sécheresses estivales à répétition ? Attaques d’insectes et gestion inadaptée ? La forêt française va mal. Le domaine de Chantilly qui s’étend du Sud de l’Oise au Nord du Val d’Oise est particulièrement touché. Administrations, experts et usagers ont décidé de se mobiliser pour trouver des solutions.
Repoussée pour raison de Covid-19, la première conférence publique pour le lancement de l’opération “Ensemble, sauvons la Foret de Chantilly”, a réuni le 12 octobre à Gouvieux, responsables politiques, administrations, forestiers, experts et usagers impliqués de près ou de loin dans sa gestion ou son utilisation.
Il faut dire que l’heure est grave. « Le réchauffement climatique touche désormais toutes les régions, y compris les Hauts-de-France », constate Xavier Bertrand, président de la Région Hauts-de-France. Une bonne raison sans doute d’apporter son soutien à Xavier Darcos, chancelier de l’Institut de France et Eric Woerth, député et président de la commission des finances de l’Assemblée nationale.
Dès cette année, la région Hauts-de-France proposera un “Master Plan” pour la forêt et la filière bois. Un million d’arbres financés par la Région seront plantés dans les trois ans. Pour le président de la Région, « c’est une goutte d’eau mais qui peut renverser les tendances pour la réappropriation de la forêt dans la région la moins boisée de France (13%). De plus, une étude pilotée par l’ONF va être menée, financée à 80% avec des fonds régionaux et des fonds Feader (Fonds européens agricoles pour le développement rural) ».
Un héritage à préserver
Le domaine de Chantilly, avec ses 6 300 hectares de forêt, a une grande valeur patrimoniale car il a été légué à l’Institut de France, en 1896, par le Duc d’Aumale, pour qu’il soit « conservé à la France (…) dans son intégrité, avec ses bois, ses pelouses, ses eaux, ses édifices et ce qu’ils contiennent ». Cette forêt est aujourd’hui composée principalement de chênes à 48%, de pins sylvestres à 12% et de hêtres à 9%, mais aussi de tilleuls et sert de lieu de promenade, d’entraînement de chevaux, de chasse et d’exploitation de bois d’œuvre.
Or aujourd’hui, les vieux chênes autour de Chantilly ou de Compiègne dépérissent et les jeunes sont attaqués par les hannetons et par le gibier. La végétation sur sol sableux se dessèche en été. « Contrairement à d’autres forêts françaises, on n’a pas trouvé d’espèce d’arbre résistante en particulier aux hannetons, confirme Eric Goulouzelle, directeur territorial Seine-Nord de l’ONF. Une solution pourrait être la forêt mosaïque qui implique une diversité des espèces, des âges, des protocoles de plantation ».
Trouver des solutions écologiques
Une autre voie pour 2100 est l’implantation de nouvelles espèces mieux adaptées comme le chêne sessile… 18 millions d’arbres seraient nécessaires. Pour Hervé Le Bouler, de France Nature et Environnement, « il faudra recréer une migration assistée, la migration naturelle des espèces étant beaucoup trop lente. On peut utiliser des mécanismes naturels et une dispersion à partir d’îlots d’avenir en restaurant une continuité écologique et des disperseurs. Il faudra aussi produire des jeunes plants déjà acclimatés et les implanter en forêt avec une forte densité pour avoir plus de sélection naturelle ». Sauver la forêt de Chantilly nécessite des solutions nouvelles et une mobilisation exceptionnelle qui pourrait bientôt servir d’exemple.