L'entrepreneuriat social, cet illustre inconnu ?
Une notoriété qui ne croît pas vraiment, des professionnels qui doutent de l'efficacité de leur action … Dix ans après la promulgation de la loi sur l'ESS, Économie Sociale et Solidaire, le récent baromètre de l'entrepreneuriat social du collectif Convergences dévoile une situation difficile.
Un
anniversaire, oui, une fête, c'est beaucoup moins évident. Dix
ans après la promulgation de la loi sur l’ESS,
Économie
sociale et solidaire,
Convergences,
un collectif engagé en faveur des ODD, objectifs
de
développement durable de l'ONU, a publié la 11ème
édition de son baromètre de l'entrepreneuriat social (le 22
janvier). Ses résultats montrent qu'en matière d'ESS, le chemin à
parcourir reste long. En effet, 66% seulement des sondés affirment
avoir déjà entendu parler du terme d’« Économie
sociale et solidaire »,
un chiffre qui reste quasi constant par rapport à 2022. Depuis cette
date, le concept d'entrepreneuriat social, lui, a gagné trois points
de notoriété pour atteindre 38%. Mais à l'inverse, d'autres
concepts qui lui sont liés – et qui sont déjà peu connus - ont
perdu du terrain, comme celui d'entreprise à impact (14%
/-2points),
ou d’investissement à impact (13% /-2points).
Par
ailleurs, le niveau de connaissance de l'ESS est très inégalement
réparti dans la société. 72% des personnes issues des CSP+
affirment le connaître, contre 59% chez les CSP-. Et les différences
sont encore plus marquées selon les tranches d' âges : 73%
des plus de 65 ans connaissent le terme, contre 52% des 25-34 ans !
« La
notoriété globale du secteur semble stagner, voire diminuer de
manière contextuelle »,
analyse l'étude.
Autre
constat, les Français n'ont pas forcément l'impression que l'ESS
s'empare précisément des sujets où ils voudraient la voir
présente, selon l'étude. En effet, 83% des interrogés associent
avant tout l'ESS à la lutte contre les inégalités sociales et à
l'exclusion. Et 76% et 66% d'entre eux, à la lutte contre la
pauvreté et la transition écologique. Or, comme l'an dernier, pour
les Français, le changement climatique arrive en tête des problèmes
les plus urgents à résoudre pour les entrepreneurs sociaux (61%),
suivi de la pauvreté (49%) et du manque de cohésion sociale (46%).
Doutes sur l'efficacité
L'étude
explore aussi les perceptions des entrepreneurs sociaux, et là
aussi, les résultats montrent que le chemin à parcourir est encore
long. Tout d'abord, en effet, les entrepreneurs sociaux ne sont pas
des entrepreneurs heureux de leur sort. Concernant leur rémunération,
71% d'entre eux estiment qu'à responsabilité égale, les métiers
de l'ESS ne sont pas assez rémunérés par rapport aux entreprises
classiques et à la moyenne nationale. Par ailleurs, 69% de ces
professionnels jugent que les structures et organismes
d'accompagnement des structures de l'ESS ne sont pas suffisamment
visibles ou accessibles.
Plus
largement, le contexte de crise et d'incertitude fait douter les
entrepreneurs sociaux, quant aux perspectives de développement de
leur activité. Ainsi, ils ne sont que 44% à estimer que les
opportunités de développement de l’entrepreneuriat à
l’international sont bonnes, une tendance stable par rapport à
l'an dernier. Le niveau de confiance dans les possibilités au niveau
de l'Europe reste stable aussi (70%). Pour la France, celui-ci
est un peu plus élevé, puisqu'il sont 74% à juger que le pays
constitue un terreau favorable au développement de l’entrepreneuriat
social.
Néanmoins, ce chiffre est en très nette baisse : l'an
dernier, cette proportion s'élevait à 81%. Et en 2016, peut-être
dans l'élan de la promulgation de la loi, ils étaient 93% !
De moins en moins optimistes quant à leur développement, les
entrepreneurs sociaux nourrissent aussi de plus en plus de doutes sur
leur efficacité. Ils ne sont plus que 30% à considérer qu'ils sont
les acteurs les plus efficaces pour faire face aux enjeux sociaux et
environnementaux, contre 43% l'an dernier.