Innovation
L'IA en Hauts-de-France : de la sensibilisation à la pratique
Deux ans après le lancement du projet IAHDF (Intelligence artificielle Hauts-de-France), il était temps de faire le point sur les avancées en région. Si le chemin est encore long avant d'arriver à impliquer toutes les entreprises à s'intéresser à l'IA, la démarche est clairement enclenchée.
En 2018, l’État (la DGEFP – Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle – et la DIRECCTE devenue DREETS – Direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités), la Région Hauts-de-France, le Medef Lille Métropole et Opcalia (devenu Akto) se sont unis pour lancer une expérimentation de deux ans pour détecter, anticiper et accompagner la transformation des compétences induites par l'émergence de l'IA en Hauts-de-France.
Alors que la région compte 1,5 million de salariés et 450 000
fonctionnaires, 230 000 collaborateurs seront sensibilisés à l'IA d'ici à
2030 selon l'étude menée. Quatrième région française en nombre
d'emplois numériques derrière l'Île-de-France, Auvergne-Rhône-Alpes et
l'Occitanie, les Hauts-de-France compterait plus de 400 chercheurs en IA
sur les 5 300 que compte le territoire.
Un levier pour l'emploi
Les besoins en formation et en recrutement pour la région se montent à
111 400 postes, dont 4 200 postes d'experts en IA à pourvoir d'ici 2023
et 6 400 postes d'experts à faire évoluer en IA. « À cinq ans, un
emploi sur cinq sera touché par l'IA ; un sur trois à dix ans. On estime
les besoins à 7 500 spécialistes d'ici à 2023 à l'échelle nationale »,
détaille Hervé Dissaux, dirigeant du cabinet Helevato. Autant dire que
les besoins sont nombreux et sur toutes les thématiques de l'IA : les
données, les algorithmes, les métiers et les usages.
À travers l'EDEC – Engagement sur le développement de l'emploi et des
compétences – qui structure cet engagement, la certification «Chef de
projet IA» a été créée en lien avec l'IMT Lille Douai pour, justement,
faire monter en compétences des collaborateurs, devenus des femmes et
des hommes "augmentés". Alors, certes, l'IA ne sera pas sans détruire
certains emplois – comme toute transition technologique –, mais elle
permettra aussi de supprimer des tâches répétitives. Surtout, l'IA
concerne tous types de métiers : du bac au bac +5. Mais aussi tous les
secteurs d'activité.
Défricher le terrain
La sensibilisation à l'IA a déjà été suivie par des collaborateurs de
chez Arc International, du groupe Amethys, du groupe Centaure France ou
encore la pâtisserie lilloise Meert, venus témoigner lors d'une journée
de bilan, le 9 septembre dernier à Entreprises et Cités
(Marc-en-Baroeul). Tous sont d'accord pour dire qu'ils ont pu mettre des
mots sur un terme qui peut paraître abstrait.
« Une dizaine de collaborateurs ont été sensibilisés. Et autant
dire qu'on partait de loin : avec le confinement et la fermeture de la
boutique, on s'est rendu compte qu'on ne connaissait rien de nos clients
ni de leurs attentes. Comment garder le lien avec eux ? Il fallait
créer une vraie base de données. Notre idée, c'est de segmenter
l'information, en plus de la collecter », détaille Thierry Landron, directeur exécutif de chez Meert.
Celui pour qui l'IA était encore « très obscure » avant le
confinement va tester prochainement la livraison à domicile, des
recettes de pâtisserie en ligne chaperonnées par Camille et vient
d'embaucher un spécialiste du marketing digital.
Même constat au sein du groupe Amethys (services et solutions durables dédiés aux réseaux d'eau) : « On
voulait savoir si l'IA était faite pour nous. Quinze collaborateurs ont
été sensibilisés et on avance puisque nous sommes en train d'installer
un ERP (entreprise ressource planning) et une GMAO (gestion de
maintenance assistée par ordinateur) pour éviter la déperdition
d'informations », complète Nicolas Baltazar, repreneur de l'entreprise.
Même s'il est encore trop tôt pour dresser un bilan chiffré de ces expérimentations, force est de constater que les entreprises semblent avoir pris le train de l'IA, avec chacune ses spécificités et ses attentes. Pionnière dans la démarche, la région Hauts-de-France devrait être rapidement suivie par l'Île-de-France, en train de lancer une expérimentation similaire sur son territoire.