Le bel essor du tourisme picard
Carnet de tendances, évolution de la consommation touristique, ancrage de la marque "Esprit de Picardie"… nombreux ont été les sujets abordés lors des rencontres 2015 des acteurs du tourisme local.
Avec 23 700 emplois et un chiffre d’affaires de 2 milliards d’euros, le tourisme est aujourd’hui un secteur clé de l’économie picarde. Passée du 21e rang en 2003 au 15e rang actuellement, la région « toujours innovante » a su « anticiper le changement », en proposant une offre plus subtile en « adéquation avec les attentes » des touristes d’aujourd’hui, comme l’a souligné Claude Gewerc, président du conseil régional. « Nous avons fait le pari de miser sur ce que nous sommes, de construire en profondeur notre attractivité, qui résonne aujourd’hui en France, mais aussi à l’international », a-t-il ajouté. Selon les dernières estimations, 35% des visiteurs viennent de l’étranger. Cette rencontre annuelle, qui a rassemblé 800 personnes cette année, est au fil des ans devenue la première manifestation nationale pour une destination locale. « Notre force est d’avoir changé le regard des Picards sur leur propre région. Notre rôle est d’inventer le tourisme de demain sur un territoire d’excellence », a rappelé Fabrice Dallongeville, président du Comité régional du tourisme (CRT).
Mutation du secteur
« Notre métier a profondément changé, nous ne sommes pas là uniquement pour relayer des informations, nous sommes passés du service à la créa- tion d’expérience. Aujourd’hui, nous devons mettre en scène des temps et des espaces pour aider les visiteurs à se construire de bons souvenirs », assure Jean-Philippe Gold, directeur du CRT Picardie. En janvier 2015, le ,ligne une plate-forme d’intermédiation proposant une sélection pointue de courts séjours personnalisés dans la région. « L’offre touristique est complexe, nous devions anticiper des besoins nouveaux, avec comme objectif de créer de la croissance sur un marché mature », note le directeur du CRT Picardie. Pour cela, les acteurs du tourisme ont fait le choix de « créer une expérience » en régénérant leur offre et en la rendant plus globale. « Nous sommes donc aujourd’hui sur un autre marché, libéré d’acteurs comme booking ou AirBnB », assure Jean-Philippe Gold.
Une marque forte
Pour réussir cette mutation, l’ensemble des acteurs touristiques a été mis à contribution. Aidés par des marketeurs, ils ont retravaillé leurs offres en partant des besoins des clients, alliant proposition fonctionnelle et émotionnelle. « Cela a été une vraie remise en cause de notre façon de travailler », se souvient Laure Henry, créatrice D’une île à l’autre, des hébergements insolites au coeur des Hortillonnages. « Il faut aller au-delà du concept de l’hébergement pour se recentrer sur l’expérience relationnelle » précise-t-elle. Une nouvelle approche qui a permis à Virginie Staub, propriétaire d’une maison d’hôtes à Compiègne de toucher une nouvelle clientèle constituée de jeunes entre 18 et 27 ans. « J’ai beaucoup personnalisé mon offre, avec des moments signatures comme le petit déjeuner, entièrement maison et réalisé avec des produits régionaux. Je propose également des adresses que j’ai moimême testées, raconte-t-elle. Le succès de notre offre sur la plate-forme Esprit de Picardie nous a encouragés à nous développer. En plus de la création d’un emploi, nous avons décidé d’associer des entrepreneurs locaux. Le territoire est une vraie accroche touristique et va nous permettre de construire un projet de développement local », annonce de son côté François Varlet, fondateur de la Maison de l’Omignon. En dix mois, la plate-forme Esprit de Picardie, qui a vocation à proposer 200 offres par an, a vu ses ventes progresser de 60% pour un chiffre d’affaires de 417 434 euros.
La Picardie à la conquête du marché chinois
Avec une dépense moyenne de 5 000 euros par personne, les touristes chinois demeurent une clientèle très recherchée et un enjeu touristique considérable. En 2012, la Picardie, quiaccueillait alors environ 150 visiteurs originaires du Pays du milieu par an, a décidé de partir à la conquête de ce marché en pleine croissance. Cinq ans plus tard, ils sont 14 000 à avoir visité Chantilly, Amiens, Compiègne ou goûté au Champagne Pannier, pour un chiffre d’affaires total de plus de 400 000 euros. « Tout a véritablement commencé avec le tournage d’un film de Jackie Chan au château de Chantilly. Il a accepté de tourner un clip faisant la promotion du château, l’effet a été immédiat. Dans un premier temps les touristes chinois venaient voir les lieux de tournage, mais ensuite, ils se sont intéressés aux peintures, à l’environnement et à l’histoire de ce lieu », raconte Frédéric Nancel, directeur chargé du développement et des événements du site. Les touristes chinois sont d’ailleurs aujourd’hui les premiers visiteurs étrangers du lieu. La montée en puissance de cette clientèle exigeante a également été rendue possible grâce à Ruying Wang, recrutée par le CRT en 2013. « En organisant des éductours à destination des voyagistes chinois, nous avons réussi à faire connaitre le territoire, ses richesses et ses atouts. Les touristes ont aussi envie de découvrir autre chose que Paris », souligne-t-elle. Des tournées prospectives qui se sont conclues notamment par un partenariat avec Caissa, leader chinois sur le marché européen. La page Internet consacrée à la Picardie du voyagiste comptabilise en moyenne 500 000 clics par jour. Une popularité qui doit aussi beaucoup au show télévisé Lu Yu Gift tourné à l’été 2014 à Pierrefonds, Compiègne, Amiens, Chantilly et vu par 400 millions de téléspectateurs. « Nous avons pour objectif d’accueillir 30 000 visiteurs en 2018 pour un chiffre d’affaires estimé à plus d’un million d’euros. Cela fait seulement onze ans que les Chinois viennent en Europe, et ils ont envie de découvrir de nouvelles destinations, autres que les incontournables. La Picardie a une vraie carte à jouer », professe fièrement Ruying Wang.