LE BURN-OUT, UN PARCOURS DU COMBATTANT

Le burnout est susceptible de concerner tout salarié.
Le burnout est susceptible de concerner tout salarié.

Invitées par la ville d’Amiens dans le cadre d’une “Rencontre santé”, Cécile Lalanne, psychiatre au CHU d’Amiens, et Catherine Doutrellot Philippon, doctoresse spécialisée dans la consultation de souffrances au travail et de pathologies professionnelles, ont traité de la thématique du burn-out le mardi 7 octobre. L’épuisement au travail reste un état de santé flou qui doit être prévenu, repéré et pris en charge.

Le burnout est susceptible de concerner tout salarié.

Encore difficile à définir, le burn-out ou “épuisement au travail” est susceptible de concerner tout salarié. « C’est un processus de dé- gradation du rapport de l’individu à son travail, au bout duquel, complètement vidé de ses ressources, il s’écroule », dicte le docteur Catherine Doutrellot Philippon. Médiatisé depuis quelques années, le burn-out a été révélé dans les années 1960 par le médecin américain Loretta Bradly. À l’époque, cet épuisement touchait salariés et bé- névoles en contact avec une clientèle exigeante ou des malades pour qui la compassion est inévitable. À présent, le burnout touche toutes les catégories professionnelles, des travailleurs indépendants aux agriculteurs.

UN DIAGNOSTIC DIFFICILE

Des rapports officiels publiés cette année par l’INRS, l’Assemblée nationale, ou encore la Haute autorité du travail prouvent que l’épuisement au travail est une réalité. Il reste cependant difficile à diagnostiquer. « Le burn-out n’est pas une maladie mais un syndrome, une accumulation de symptômes. Il faut différencier une souffrance psychique du burnout directement lié à son lieu de travail, ce qui n’est pas toujours évident », précise la spécialiste. Une complexité renforcée par le fait que les symptômes ne sont pas les mêmes pour tous les patients. Le burn-out peut-être nié par la personne concernée, ou au contraire diagnostiqué à tort. Cécile Lalanne explique repérer trois stades dans l’évolution du syndrome chez ses patients. « Une simple fatigue apparaît dans un premier temps. Puis viennent l’irritabilité, les douleurs musculaires, la perte d’appétit et de sommeil, l’addiction aux stimulants et aux médicaments. Le dernier stade est marqué par une forte dépression, une déshumanisation proche du cynisme et du détachement de tout. Surmenée, la personne ne se rend plus compte de son état, c’est souvent l’entourage qui tire la sonnette d’alarme.»

PRÉVENTION EN ENTREPRISE

Après un cas d’épuisement professionnel, l’entreprise doit se remettre en question et revoir son organisation. « Nous sommes entrés dans une ère où la rentabilité maximale est recherchée au dé- triment de la qualité. Petite à petit, cela peut provoquer une perte d’épanouissement dans son travail », constate la psychiatre. Manque de reconnaissance, mails professionnels à toute heure, réduction de personnel pour la même charge de travail : autant de facteurs peuvent à terme mener à un stress chronique. Selon le docteur Lalanne, le seul vaccin et remède au burn-out est la communication. « Il vaut mieux demander à son employeur de ralentir le rythme. Le temps perdu sera de toute manière moins conséquent qu’un arrêt maladie par la suite », explique-t-elle.

Aux supérieurs soucieux du bien-être de leurs employés, des questionnaires existent pour tester le rapport des salariés au burn-out : « Trouvable sur Internet, le questionnaire de MBI sert à faire des statistiques. Une consœur, Marie Peze, a aussi rendu disponible une auto-évaluation approfondie. Mais il y a toujours un risque de sur-diagnostic », indique le docteur Lalanne.

REPRENDRE LE TRAVAIL APRÈS UN BURN-OUT

« Bien que ça semble impensable pour la personne concernée, l’urgence lors d’un burn-out est d’arrêter le travail pour prendre du recul », prescrit le docteur Doutrellot Philippon. Le processus de guérison du burn-out est d’une durée variable. « Certains ne reviennent plus du tout au travail, d’autres se lancent dans une reconversion ou préfèrent devenir leur propre patron », continue-t-elle. En cas de retour dans l’entreprise d’origine, une pré-reprise peut-être demandée par le médecin conseil en accord avec l’employeur. « Le but n’est pas de revenir dans les mêmes conditions mais de cibler ce qui a provoqué le burn-out, fixer de nouveaux objectifs, voire intégrer un nouveau service », précise la doctoresse.