Le canal Seine-Nord Europe revient par la grande porte
Même si les bulldozers ne vont pas entrer en action demain, l’optimisme renaît chez tous les acteurs du projet.
Jean-François Cordet, préfet de la région Picardie, en tant que coordonnateur du projet a convié la presse, en présence de deux directeurs de VNF. L’occasion de découvrir les modifications du tracé qui seront effectives entre Allaines dans la Somme et Havrincourt dans le Pas-de-Calais. Ceci fait suite aux préconisations faites dans le rapport du député du Nord, Rémi Pauvros, afin de réduire le coût très élevé de cet ouvrage d’art. Nicolas Bour, directeur des liaisons européennes et de l’innovation chez VNF, a présenté la configuration qui devrait être retenue du bief de partage (secteur d’une voie navigable compris entre deux écluses) : « Il s’agit de réutiliser le canal du Nord sur huit kilomètres, le plus possible entre Allaines et Etricourt-Manancourt, et le faire passer plus à l’ouest de Ruyaulcourt. Les niveaux seront abaissés de 15 à 20 mètres et cela permettra de supprimer une écluse à Havrincourt et de réduire la chute d’eau d’une deuxième écluse à Moislains. Dans cette commune, le canal sera remblayé. » Cela engendrerait 600 millions d’économies. Des réunions ont eu lieu depuis le mois de mai entre les communautés de communes de la Haute-Somme et du sud de l’Artois, ainsi qu’avec les co-financeurs potentiels que sont les CCI, les chambres d’agriculture, les chambres des métiers et de l’artisanat, les organismes économiques et les associations locales de protection de l’environnement. En effet, il s’agit d’avoir le long du canal Seine-Nord Europe un paysage de proximité, en introduisant des usages adaptés, comme la sylviculture, la culture, des activités de loisirs et des espaces naturels. Depuis dix ans que ce projet est à l’étude, il a rencontré de nombreuses péripéties, à commencer par la suspension du dialogue compétitif en 2012. La mission de reconfiguration confiée à Rémi Pauvros entre avril et décembre 2013 a vu la signature de l’accord de Tallin (Estonie) le 17 octobre 2013, stipulant que le périmètre de la liaison fluviale européenne Seine-Escaut, dont le canal SNE est le maillon manquant, est éligible à un financement européen jusqu’à 40 %.
Estimer les coûts
Le préfet l’a rappelé : « Il n’y aura plus de PPP, mais des allotissement. 2014 est l’année de la remise en route du projet, la remise en phase des procédures administratives. La concertation est étendue, un accord global sur la présentation du tracé a été acté ce matin au cours de la réunion très constructive que j’ai tenue avec les élus, les agriculteurs, le monde économique. La mise en place de différents groupes de travail est validée. Nous avons des thématiques sur les réserves foncières, les fouilles archéologiques, les activités économiques. » Ce dernier point est lié à l’existence de plates-formes le long du tracé. Il est prévu qu’elles se fassent au fur et à mesure. À ce jour, aucune n’est abandonnée. Il est indispensable que celles-ci génèrent des résultats économiques et financiers. Les études des nombreux ouvrages qui vont jalonner le canal vont déboucher sur une estimation des coûts. Ceux-ci déclencheront la DUP modificative (déclaration d’utilité publique) prévue à l’été 2015. Cette étape est très importante pour la demande des subventions à l’Europe. Il ne faut pas oublier le dossier épineux de l’évacuation des 14 millions de mètres cubes provenant des excavations et surtout leurs lieux de dépôt. Le préfet a conclu cette conférence en ayant des propos optimistes : « Le tour de table doit permettre de rassembler les financements sur la base d’engagements fermes des collectivités, de l’État et de VNF. C’est indispensable si nous voulons obtenir les financements européens. L’Europe sera un partenaire financier très important car Bruxelles est très favorable à ce projet. » Ce nouveau projet ne peut pas connaître un échec qui serait alors irréversible.
Stéphane Demilly : « Nous sommes confiants »
Conséquemment à la réunion organisée par le préfet de Région avec les élus et acteurs économiques concernés au premier chef par le canal Seine-Nord Europe, Stéphane Demilly, député de la 5e circonscription de la Somme, accompagné de Philippe Cheval, président du Pays Santerre Haute-Somme, et André Salomé, président de la communauté de communes du Pays neslois, Patrick Deguise, maire de Noyon, et Jacques Petit, maire de Marquion (Pas-de-Calais), sont allés à l’Élysée le 18 juillet afin de rencontrer les conseillers du Président de la République, du Premier ministre et du ministre des Transports en charge du dossier du canal Seine-Nord Europe. « Nous avons rappelé l’importance économique, créatrice d’emplois, environnementale et territoriale du projet, en soulignant que 300 millions d’euros ont déjà été dépensés pour les fouilles archéologiques, les études, les rachats de terres agricoles. Le rapport de Rémi Pauvros, député du Nord et coordonnateur du projet, a la volonté de faire aboutir ce projet. Sans décision rapide du Président de la République, l’inflation du coût du projet, aujourd’hui estimé à 4,5 milliards d’euros, pourrait une fois de plus faire basculer le projet. Le dossier est avancé, L’État va le déposer au plus tard en février 2015 devant la Commission européenne, en s’assurant que le tour de table avec les collectivités est bel et bien bouclé. Cela permettra à la Commission européenne de financer 40 % des travaux. Le canal se fera avec l’Europe, dont la part serait de 1,8 milliard d’euros ; l’État participerait à hauteur de 1 milliard, comme les collectivités locales ; et un emprunt de 0,8 million d’euros serait contracté. Dans la foulée de la décision de l’Europe fin 2015, il faudra une déclaration d’utilité publique modificative enclenchée par l’État. Notre détermination reste très forte et nous continuerons notre lobbying dès septembre. Nous sommes confiants. »