Le Tribunal de commerce de Compiègne fait le point sur le remboursement du PGE
Un colloque a été organisé le 14 avril par le Tribunal de commerce de Compiègne, accueilli dans les locaux de la Fédération française du bâtiment de l'Oise. Le moment de faire le point sur les différentes possibilités pour les entreprises de restructurer le remboursement du PGE afin d'éviter, in fine, un défaut de paiement. Et une multitude d'aides existe... le tribunal se plaçant en amont, dans la prévention.
Depuis 2020, la
France connaît des crises successives bousculant l'économie. Le
gouvernement a lancé les Prêts garantis par l’État (PGE), en 202, pour
stabiliser la trésorerie des entreprises, puis le PGE Résilience en
direction des entreprises touchées par la guerre en Ukraine. Si, pour
le Tribunal de commerce de Compiègne, le PGE a été « très
efficace » afin d'éviter une hécatombe de défaillances
d'entreprises en 2021 et 2022, la situation en ce premier trimestre
2023 ne s'annonce pas de la même teneur, avec un doublement des
injonctions d'impayés et des liquidations judiciaires depuis janvier
2023, comparativement aux trois premiers mois de 2022.
Alors, pour éviter
que certaines entreprises ne croulent sous les dettes, le Tribunal de
commerce de Compiègne a organisé un colloque pour faire le point
sur les aides à la restructuration du remboursement de ce prêt
garanti par l’État. L'objectif ? Restructurer le fond de
roulement. Tribunal de commerce, Banque de France, Urssaf, DDFIP,
experts-comptables, commissaires aux comptes... tous les
professionnels du chiffre sont rassemblés à l'heure où les
remboursements du PGE deviennent un fardeau pour certaines
entreprises, allant droit vers le redressement judiciaire afin de
pouvoir le rembourser. « Parce que le PGE a été lancé en
2020 sans prévoir que d'autres crises économiques allaient impacter
les entreprises », explique Yves Lenormant, vice-président
du Tribunal de commerce de Compiègne. Aujourd'hui, il faut
restructurer et il ne faut pas que les entreprises attendent. Il faut
agir vite. »
Rembourser au-delà de six ans : la médiation du crédit
Une première possibilité de restructuration du remboursement du PGE
provient de la Banque de France, avec le recours à la médiation du
crédit. Ce dernier n'est accessible qu'aux entreprises qui
rencontreraient des difficultés avérées à rembourser leurs
échéances de PGE d'ici la fin de l'année, et enregistrant un chiffe
d'affaire de moins de 50 000 euros. Cette procédure confidentielle
permet de prolonger la durée légale de remboursement (étant de six
ans), de deux ans, voire de quatre ans de façon exceptionnelle. «
Il faut une entreprise en bonne santé financière et il faut aussi
un rapprochement avec les experts-comptables »,
explique Line Berthelot, directrice de la Banque de
France Oise et médiatrice du crédit. La médiation du crédit est
conduite par 105 médiateurs du crédit territoriaux via un site
Internet dédié. Un autre dispositif existe pour les entreprises enregistrant un
chiffre d'affaires de plus de 50 000 euros : une saisine en
ligne du conseil départemental en vue d'orienter vers les meilleurs
solutions.
Dans ces deux cas, la restructuration se fait de façon globale, car la
médiation du crédit concerne l'ensemble des concours bancaires :
si le remboursement du PGE est revu, il sera restructuré avec
l'ensemble des crédits et un nouveau contrat de prêt sera signé.
Cependant, « ce contrat sera signé avec des taux d'intérêt
plus élevés qu'en 2020 », précise encore Line Berthelot.
De leur côté, l'Urssaf et la Dreets proposent soit des échéanciers
différés des cotisations sociales, soit une vision à 360° des
difficultés pour une restructuration globale.
Restructurer grâce à la prévention
Autre solution proposée, cette fois par le Tribunal de commerce :
la prévention avec le mandat ad hoc et la conciliation. « L'objectif
est de permettre une négociation confidentielle et à l'amiable avec
les principaux créanciers et une restructuration des dettes »,
note maître Daniel Valdman, administrateur judiciaire du cabinet
RéAJIR. Ces deux procédures de prévention permettent aux
entreprises de négocier et d'être aidées par le tribunal dès lors qu'une difficulté du paiement des charges
fiscales, sociales, bancaires, locatives ou fournisseurs commence. Et
leur succès ne repose que sur la négociation. « C'est le
moment où il y a encore des choses à sauver », précise
Yves Lenormant. Avec des conditions : l'entreprise ne doit pas
être en cessation de paiement pour le mandat ad hoc et ne pas l'être
depuis plus de 45 jours pour la conciliation.
Dans cette voie, un rééchelonnement ou cas de conversions de
créances en capital peuvent être négociés dans le cadre d'un
protocole d'accord constaté. Là aussi, le prolongement de la durée
du remboursement peut être revue à huit ou dix ans. Un prolongement
jusqu'à dix ans nécessaire pour le CPME Oise, rappelant que
« beaucoup d'entreprises sont asphyxiées », avec de surcroît les
grèves actuellement impactant sévèrement certaines d'entre elles.
Les procédures collectives
La dernière voie possible reste celle des procédures collectives.
D'abord le redressement judiciaire simplifié (soit la procédure de
traitement de sortie), dans laquelle une entreprise de moins de 20
salariés doit être en cessation de paiement mais disposer de fonds
pour régler les créances salariales. Puis, la procédure de
sauvegarde simplifiée dont l'objectif est de bénéficier d'un plan
de sauvegarde dans un cadre de conciliation. « Dans ce cas,
c'est le chef d'entreprise qui gère le plan », précise
encore maître Daniel Valdman. Un nouveau dispositif a aussi été
créé, la procédure de classes de parties affectées qui permet un
découpage des créanciers dans différentes classes, votant le plan
et amenant, selon les votes à un abandon de créances.
Finalement, le remboursement du PGE s'inscrit dans un nouveau contexte économique et des solutions sont proposées, avec comme maître mot : « ne pas attendre », comme le rappelle la Banque de France, elle aussi disposée à soutenir les entreprises en difficulté de paiement. Parce que les années 2023 et 2024 seront les années charnières de cette crise économique, « il faut anticiper sur les situations », rappelle encore Yves Lenormant, restant positif avec aujourd'hui « une économie qui fonctionne à plein régime ». Même si la santé économique se mesure communément par la santé économique du secteur du BTP : "Quand le bâtiment va tout va"... et aujourd'hui, comme le répète depuis deux ans la FFB Oise, le secteur du bâtiment vacille.