Négociations commerciales : une bulle de paix avant la mêlée

Certaines PME et distributeurs parviennent à travailler ensemble : fin septembre, une dizaine de partenariats exemplaires étaient distingués par la FEEF, Fédération des entreprises et entrepreneurs de France. En attendant l'épreuve des négociations commerciales...

(c)Anne Daubrée.
(c)Anne Daubrée.

« Bulle de paix » : l'expression est d'Olivia Grégoire, ministre chargée des Petites et moyennes entreprises, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, dans son discours d'ouverture. Elle a rebondi tout au long de la soirée des « FEEF d'or », le 19 septembre, à Paris. La cérémonie distinguait les dix meilleurs partenariats entre des enseignes de la grande distribution et des ETI ou des PME. Chaque année, les « FEEF d'or » sont organisées par la FEEF, Fédération des entreprises et entrepreneurs de France, qui rassemble près de 1000 PME fournisseurs de la grande distribution.

Sur la scène du Casino de Paris, sont par exemple montés ensemble Sylvain Chevalier, chargé de l'innovation culinaire chez Elior, spécialiste de la restauration collective et Emmanuel Brehier, dirigeant et fondateur de Hari&Co (35 salariés). Cette société fournit 70 tonnes annuelles de produits à base de légumineuses bio à Elior. Le premier contrat a été signé en 2018. « Un véritable tremplin », commente Emmanuel Brehier qui avait fondé l'entreprise quatre ans plus tôt. Certains partenariats distingués sur scène restent invisibles aux yeux des consommateurs : les bières de la brasserie artisanale Rabourdin (six salariés) sont présentes dans les rayons de Casino, mais pas sous leur propre marque... Quant à la palme du partenariat le plus ancien, elle revient à celui entre Carrefour et Sabarot, entreprise familiale fondée en 1819 qui commercialise notamment céréales et légumes secs (56 millions d’euros de chiffre d'affaires, en 2020). Le père de l'actuel président Antoine Wassner (7ème génération), vendait déjà ses Lentilles vertes du Puy au distributeur. Aujourd'hui, la gamme a été élargie, avec notamment le Petit épeautre du Velay.

Descente aux enfers

Au cours de la soirée, ce sont autant de partenariats fructueux qui ont été donnés en exemple. Des exceptions ? Autour de cette « bulle de paix » saluée par Olivia Grégoire, la ministre a aussi rappelé le « contexte difficile des relations inter-entreprises » et les négociations commerciales, « enjeu des semaines à venir ». Léonard Prunier, président de la FEEF, a évoqué la « descente aux enfers » de nombreuses entreprises du secteur.

D'après des données de la Banque de France, près du tiers des entreprises de la FEEF sont déficitaires en 2022, un chiffre qui monte jusqu'à 46% (vs. 23% en 2021) pour les spécialistes des produits DPH (droguerie parfumerie, hygiène). Et entre 2021 et 2022, le taux de marge brute d’exploitation a baissé de 26,5%. « Les PME et ETI souffrent. Elles n'ont pas réussi à répercuter l'inflation », a expliqué Léonard Prunier, inquiet des négociations à venir.

Une semaine après les FEEF d'or, le 27 septembre, le projet de loi visant à avancer le calendrier des négociations commerciale 2023-2024 était présenté en Conseil des ministres. Pour la FEEF « en passant avant les PME-ETI dans les négociations comme le prévoit le texte actuel, les multinationales vont cannibaliser les budgets de la grande distribution et préempter une grande partie du linéaire disponible, laissant très peu de contreparties accessibles aux PME-ETI ». Déjà, le 19 septembre, Léonard Prunier prévenait : « les entreprises ont besoin de clôturer les négociations avant le 31 décembre. C'est la ligne rouge ».