« Nous sommes dans un contexte de reprise progressive des chantiers »
Pour les petites et moyennes entreprises du bâtiment, si les chantiers sont globalement assurés pour les trois mois à venir, l’incertitude pèse sur la rentrée de septembre. Entretien avec Alexandre Malfait, secrétaire général de la Capeb Hauts-de-France.
À l’heure du déconfinement général, comment se porte l’activité des petites et moyennes entreprises du bâtiment que vous représentez ? Les commandes sont-elles toujours là ?
Alexandre Malfait : Ça a été compliqué. Mais nous sommes dans un contexte de reprise progressive des chantiers. En général, une entreprise du bâtiment a trois mois de commandes devant elle, et ce sont sur ces chantiers que le travail reprend. Néanmoins, pour certaines entreprises, on constate que les devis sont à la baisse. Des gens qui avaient 15 k€ de travaux vont reculer vers 10 k€. La crise est déjà là, même si elle ne fait que commencer. On attend les plans de relance. L’État doit notamment annoncer le plan de rénovation énergétique. Le secteur en attend beaucoup, cela doit permettre une relance vertueuse, verte, écologique. Et cela pourrait permettre d’éviter que la rentrée de septembre soit catastrophique. Les devis ont déjà subi une baisse. On a peur du coup d’arrêt.
On a tous vu les files d’attente devant les magasins de bricolage, lors du début du déconfinement. Est-ce que le bricolage “maison” risque de peser sur votre activité, ou ce n’est qu’anecdotique ?
n sait de manière certaine que beaucoup de gens ont fait des travaux chez eux. Les gens avaient tous les défauts de leurs maisons du matin au soir devant les yeux. Ce n’est pas si anecdotique que cela. Sur la peinture et la décoration par exemple, cela risque d’avoir un impact : des travaux qui devaient être faits par des entreprises ne le seront peut-être pas. On a des fournisseurs de matériaux, notamment la peinture, qui ont vu des augmentations de chiffre d’affaires considérables. De nombreux magasins de bricolage ont été dévalisés. Les transporteurs qui les fournissaient ont été saturés. C’est encore trop tôt pour dire si cela aura un fort impact, mais cela ajoute une incertitude supplémentaire.
La Capeb a largement communiqué sur la rigueur de ses protocoles sanitaires, afin de rassurer les particuliers et facilité la reprise des chantiers. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce protocole ?
Dès le début de la crise sanitaire, les représentants de la profession ont travaillé, avec des contributions locales et régionales, pour un protocole sanitaire qui a été soumis au ministère de la Santé et du travail pour que les chantiers puissent reprendre. Le secteur l’un des premiers à avoir appliqué et édicté ce protocole. On a essuyé les plâtres, à un moment où l’épidémie était très forte. C’est un protocole très détaillé, de 17 pages, qui est très strict, très rigide. Nous voulons être les plus prudents possible, pour protéger nos collaborateurs et nos clients.
Concrètement, comment cela se passe-t-il sur le terrain ?
La règle principale c’est de respecter les gestes barrière. Cela passe par des masques, du gel hydroalcoolique, du désinfectant, des combinaisons, l’aération des bases de vie… Différentes catégories de masques sont utilisées selon les typologies de chantier. A minima c’est le masque chirurgical. Il n’y a aucun risque pour le particulier. Nous désinfectons toutes les zones du chantier et on remporte tout, notamment les EPI. Le chef d’entreprise vérifie régulièrement que le collaborateur n’est pas atteint par une pathologie. Et de la même manière, nous vérifions que le particulier lui non plus n’est pas atteint de pathologies. Dans le bâtiment, nous avons pas mal de collaborateurs qui sont des salariés à risque, il était très important de ne pas leur faire prendre le moindre risque à ce niveau. Un référent Covid-19 a aussi été nommé par chaque entreprise, pour vérifier que le protocole sanitaire est bien appliqué.
Les entreprises ont-elles sollicité les soutiens proposés par l’État ?
Les entreprises du bâtiment sont venues chercher majoritairement le chômage partiel. Aujourd’hui, elles en sortent. Certaines sont allées chercher le prêt garanti par l’État. Ce prêt a permis aux entreprises de faire la jointure entre l’arrêt de l’activité et la reprise. À la Capeb, nous avons été vigilants, et nous avons fait le lien entre la Région, les banques… Les banques ont joué le jeu, et les entreprises ont été rationnelles. Elles se sont dit que ce prêt allait leur permettre de faire face. Mais il ne s’agit pas que les entreprises aillent chercher de l’argent si elles ne peuvent pas le rembourser. Les entreprises qui arrivent à avoir des prêts garantis font l’objet d’une analyse fine par les banques.