Philippe Vasseur missionné pour revitaliser les Hauts-de-France
Emmanuel Macron et Xavier Bertrand ont signé le 31 mai dernier une lettre commune à l'adresse de Philippe Vasseur afin de lui « confier une mission autour de cet objectif de revitalisation et de réindustrialisation des Hauts-de-France sous le titre de commissaire spécial ».
Le ministre était ce jour-là dans le Valenciennois pour un déplacement sur le thème de la réindustrialisation en plusieurs étapes : à la sous-préfecture pour la table ronde “Une ambition pour la réindustrialisation de la région des Hauts-de-France”, puis à La Sentinelle pour la visite du centre Afpa, suivie un peu plus tard par celle de l’usine Simmons, spécialisée dans la fabrication de matelas à Saint- Amand-les-Eaux. Un déplacement qui aura aussi été l’occasion de la signature d’une convention associant les groupes Vallourec − en plein plan de sauvegarde de l’emploi et dans l’obligation de faciliter le reclassement des salariés −, Safran Aircraft Engines et Air France-KLM industries, dans un projet de création sur le parc d’activité de Sarset- Rosières, dans la communauté d’agglomération de La Porte du Hainaut, d’une usine commune de maintenance prometteuse de 200 à 250 emplois nouveaux d’ici à 2020, dont une soixantaine affectée à des Vallourec. Ce, moyennant un investissement de 20 millions d’euros et une participation à hauteur de 1,2 millions d’euros de la Région en aides à l’investissement et à la formation.
Le contexte
Dans la lettre de mission, Emmanuel Macron et Xavier Bertrand ont rappelé le contexte de cette mission : « Depuis de nombreuses années maintenant, la Région Hauts-de- France connaît de lourdes difficultés dans l’ensemble de ses secteurs économiques, et en particulier son industrie. »
Si la Région représente encore 10% des effectifs nationaux de ce secteur, 273 000 salariés pour près de 16 000 établissements, ce sont, rappellentils, près de 100 entreprises industrielles qui ont fermé entre 2009 et 2015.
Et c’est l’Insee qui, dans son “bilan économique 2015” régional présenté le même jour, indique que, « en recul depuis plusieurs années », l’emploi salarié industriel régional « en 2015 se replie de -1,8%, soit une baisse comparable à celle des années précédentes » et que « tous les départements sont concernés, en particulier la Somme (-3%) et l’Aisne (-2,2%) ».
Loin du pessimisme ambiant et dans la lignée des engagements dont ils se réclament, notamment en faveur de l’emploi, les deux signataires affichent une forte conviction : « Nous croyons à l’industrie et à son potentiel (…) qui exige que nous expérimentions, pour enrayer cette spirale, des solutions nouvelles auxquelles se verraient dédiés des moyens exceptionnels. »
La mission
Pour être « la personne la plus à même de relever ce défi », le “commissaire spécial” Philippe Vasseur s’est déclaré « entièrement mobilisé pour la réussite de cette mission ». « Une mission pas évidente, ciblant la recherche de repreneurs, d’investisseurs ou de porteurs de projet (…) et de mobilisation des moyens financiers nécessaires », mais aussi le développement d’un réseau d’acteurs susceptibles d’être partie prenante sur des opérations de reprise d’actifs industriels…
Des moyens, Philippe Vasseur ne devrait pas en manquer, tant financiers qu’humains, entre les enveloppes dédiées à la revitalisation dont doivent s’acquitter les acteurs privés à l’origine de restructurations et la saisine des services centraux et déconcentrés de l’État, des services de la Région, de Bpifrance ou encore de BusinessFrance, tous grands dispensateurs de fonds publics. La lettre de mission précise aussi que « ce cadre dérogatoire et exceptionnel prendra la forme d’une expérimentation d’une durée de 18 mois (…) et visera plus particulièrement les territoires les plus touchés par les restructurations, parmi lesquels le Valenciennois et l’Avesnois, le bassin de Chauny-Tergnier- La Fère, le nord-est de la métropole lilloise (Roubaix-Tourcoing), le Bassin minier, le Dunkerquois et l’Amiénois ».
La mission dévolue à Philippe Vasseur rappelle en bien des points celle de “commissaire à la conversion industrielle” qui avait été confiée à Pierre Billecocq de 1966 à 1968 et à Jean Mattéoli de 1968 à 1973, aux heures de gloire de la DATAR devenue Commissariat général à l’égalité des territoires.
À ceci près qu’aujourd’hui État et Région se partagent le pouvoir économique régional. Amusant ou juste retour des choses que de confier à un consulaire, plutôt qu’à un politique ou à un grand commis de l’État, la mission de coordonner ces partenaires.
La Région a besoin de nombreux “Toyota”, exemple réussi de la synergie de tous les intervenants sur un projet porteur de développement économique.
Jean-Luc DECAESTECKER