Plaidoyer pour une « renaissance industrielle »
L’industrie du XXIe siècle peut contribuer à l’avènement d’un monde meilleur, plaide Olivier Lluansi. Cette transformation passerait par les territoires, pour leur plus grand bénéfice.
« Il n’y a nul paradoxe, nulle contradiction à affirmer que l’industrie, qu’elle fut, à la fois, du XVIIIe au XXe siècle, la source d’une des plus grandes prévarications de la nature et qu’elle sera au XXIe siècle le creuset des solutions adaptées à la finitude des ressources naturelles », écrit Olivier Lluansi, dans Les néo-industriels, l’avènement de notre renaissance industrielle (Ed Déviations). L’auteur, qui a mené une carrière éclectique, (dans le public et privé), contribue actuellement au think tank la Fabrique de l’Industrie, émanation du monde industriel. Son ouvrage constitue un plaidoyer pour une industrie vue comme un ensemble de savoirs et de savoir faire qui se mettrait au service d’une société « décarbonée, circulaire, sobre et souveraine ». Mais reconstruire une industrie en France constitue une « course de fond d’au moins deux décennies », prévient l’auteur…
Parmi les thèmes qu’il développe, l’enjeu territorial apparaît comme central , et la participation des acteurs de ces écosystèmes, indispensable à la réussite de cette transition. Et les outils de politique publique actuels ne seraient pas adaptés. Ainsi, il faut prendre acte de la faible mobilité des Français et « former dans le territoire, pour le territoire », avance Olivier Lluansi. Pour lui, il faut laisser les collectivités élaborer leurs projet territoriaux de gestion prévisionnelle des emplois et compétences, et travailler avec les industriels à collaborer pour monter écoles de production ou centres de formation partagés . Aujourd’hui, « la centralisation des financements de la formation entrave son adaptation au terrain », estime Olivier Lluansi. Autre difficulté, l’État dispose de 175 milliards d’euros destinés aux politiques économiques, contre 8 milliards pour les collectivités locales. « Nous concentrons les moyens publics au niveau national, loin des implantations de nos entreprises, notamment industrielles », note Olivier Lluansi.
Des écosystèmes - aussi - territoriaux
A contrario, des dispositifs publics misant sur la dimension locale ont montré qu’il existait « une ressource aussi essentielle qu’inexploitée », argumente Olivier Lluansi. En trois ans, le programme « Territoires d’industrie » (qui a été porté par l’auteur du livre) a permis le développement de 180 projets portés par des binômes élu-industriel. Et la démarche « Rebond », initiée en 2021, a permis d’accélérer 1 100 projets sur 20 territoires. La dimension territoriale de cette « renaissance » de l’industrie se transcrit aussi dans la nécessaire évolution des sites productifs. La production de masse des Trente glorieuses a bénéficié à des grands groupes dont les infrastructures visaient les économies d’échelle. Les impératifs actuels d’exigence environnementale et de personnalisation de masse appellent des « écosystèmes » d’acteurs productifs (fabriques, centres de développement ...). Pour Olivier Lluansi, ce changement exige une meilleure représentation des PME et des ETI au sein du Conseil de l’Industrie. Et aussi, au-delà de la vingtaine de filières existantes, la constitution d’une centaine « d’écosystèmes thématiques », et « horizontaux » qui pourraient associer des productions dans une logique territoriale.
Souveraineté économique, écologie… Cette possible renaissance de l’industrie est porteuse de plusieurs thèmes, mais celui de la cohésion et de l’aménagement du territoire n’est pas des moindres. Pour Olivier Olivier Lluansi, « notre modèle économique a produit une nation fragilisée par ses fractures internes, par la répartition inégale de la richesse entre les territoires. La renaissance industrielle est l’outil nécessaire et indispensable pour redonner une cohésion au sein de la société, notamment du point de vue territorial ».