Télétravail : où en est-on en France ?

Le télétravail est devenu une pratique courante en France. Un peu plus d’un salarié du privé sur cinq en bénéficie. La crise sanitaire a accéléré la mise en place d’accords d’entreprise, stabilisant ce mode de travail à environ deux jours par semaine. Les cadres, en particulier dans les secteurs financiers et de la communication, sont les plus concernés.

(c) Adobe Stock
(c) Adobe Stock

De marginale à contrainte pour les métiers le permettant, lors des confinements sanitaires d’il y a cinq ans, la pratique du télétravail s’est normalisée dans le monde professionnel. C’est ce qu’évalue l’Insee dans l’état des lieux qu’elle vient de dresser avec la Dares (ministère du Travail).

Une tendance de plus en plus ancrée

Alors qu’avant la pandémie, en 2019 le télétravail ne concernait que 4% des salariés du privé, il s’est envolé pendant la crise sanitaire, puis stabilisé à plus de 20%, en 2022. Au premier semestre 2024, ce sont 22% des salariés qui télétravaillent principalement en mode hybride, avec en moyenne près de 2 jours (1,9) à distance par semaine, selon les données de l’étude. Près de 70% des salariés en postes « télétravaillables » y recourent. Si la part des télétravailleurs parmi les salariés reste stable depuis 2022, le nombre de jours en distanciel connaît lui une légère baisse, « avec toutefois une hausse modérée et temporaire chaque hiver », précise l’Institut de statistique.

Et la pratique a été progressivement formalisée par des accords d’entreprise, qui sont passés de moins de 1% en 2017 à 4% en 2022. Alors qu’avant la crise Covid, ces accords fixaient majoritairement le télétravail régulier à un jour par semaine. Cette limite a évolué avec près de la moitié de ceux mentionnant ce mode de travail signés pour une durée indéterminée.

A noter, qu’entre juillet 2022 et juin 2024, 11% des salariés n’ont pas pu télétravailler malgré leur souhait, dont la moitié du fait de leur employeur, tandis que 20% ayant un poste le permettant n’ont pas souhaité en bénéficier.

Des environnements spécifiques

Autre tendance relevée, la pratique du télétravail augmente avec la taille et la catégorie d’entreprises. Entre 2022 et 2024, 18% des salariés des PME télétravaillent, contre 26% dans les ETI et 34% dans les grandes entreprises, souvent multinationales, caractérisées par une forte présence de cadres. L’intensité du travail hors site est cependant plus faible dans les grandes entreprises par rapport aux autres. Les secteurs de l’information-communication et des services se distinguent par des taux élevés : 75% et 60% des employés y travaillent en distanciel, avec une fréquence moyenne de 2,3 jours, par semaine dans l’information-communication, contre 1,8 jour dans les autres secteurs.

Sans surprise, le télétravail est largement répandu chez les cadres et professions intellectuelles (66%, dont 18 % parmi les professions libérales), contre seulement 22 % pour les professions intermédiaires (enseignement, techniciens, agents de maîtrise...), mais il reste quasi inexistant chez les ouvriers. Seuls 10 % des employés sont concernés en raison de la nature de leurs emplois. Même lorsque le télétravail est possible, il y ont moins accès : 13% se voient refuser cette pratique par leur employeur, contre moins de 3% des cadres. Autre constat, les entreprises avec une forte proportion de cadres favorisent l’activité professionnelle hors site pour les autres salariés.

Des différences d’accès

Au-delà du secteur et de la profession, le travail en remote est influencé par des facteurs individuels et familiaux. La situation familiale, la distance domicile-travail et la taille du logement ont un impact. Par exemple, les employés éloignés de leur lieu de travail ont tendance à plus télétravailler : ceux qui doivent parcourir entre 50 et 100 kilomètres pour se rendre au bureau ont une probabilité d’y recourir 10,4 % plus importante que ceux vivant à moins de 5 kilomètres, précise l’étude. Habiter dans un logement spacieux incite aussi à le pratiquer davantage que ses collègues. Les femmes sont plus enclines à télétravailler que les hommes, mais pas les parents de jeunes enfants.

La catégorie socioprofessionnelle et les caractéristiques de l’entreprise restent les principaux facteurs expliquant les écarts de recours entre salariés. Les employés en début et en fin de carrière télétravaillent moins que ceux en milieu de carrière, soit en raison de la nature de leurs emplois soit, pour les débutants, des réticences de leurs employeurs « possiblement pour favoriser leur supervision et leur intégration au collectif de travail », analyse l’Insee. Les entreprises privilégient aussi la présence sur site des managers.

A.B et B.L