TOP DÉPART POUR LES RUPTURES CONVENTIONNELLES COLLECTIVES
Les entreprises s’emparent de la rupture conventionnelle collective. Certaines ont annoncé leur intention d’y recourir pour réduire leurs effectifs. Ce nouveau dispositif, créé par l’une des ordonnances Macron réformant le Code du travail et précisé par deux décrets du 20 décembre 2017, encadre les départs volontaires des salariés. Éclairage sur sa mise en œuvre.
Le système de rupture conventionnelle collective emprunte à la fois à la rupture conventionnelle individuelle mise en place en 2008 et aux licenciements économiques prononcés dans le cadre d’un plan social pour l’emploi (PSE). Pour certains, ce nouveau mode de rupture, qui n’est pas subordonné à l’existence d’un motif économique de licenciement, constitue un excellent outil aux mains des employeurs souhaitant renouveler la pyramide des âges. Pour d’autres, il s’agit d’un moyen pour les entreprises de se séparer de salariés plus ou moins volontaires au départ, sans avoir à passer par un lourd PSE. Toutefois, selon le rapport au président de la République, les Direcctes (Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi) vérifieront qu’il n’y a pas de détournement de procédure, notamment par un ciblage inapproprié de certaines catégories de salariés, comme les seniors.
LE CONTENU DE L’ACCORD COLLECTIF
L’accord collectif d’entreprise portant rupture conventionnelle collective peut définir les conditions et modalités de la rupture d’un commun accord du contrat de travail. Ces ruptures, exclusives du licenciement ou de la démission, ne peuvent être imposées par l’une ou l’autre des parties. L’accord collectif détermine le contenu de la rupture conventionnelle collective, excluant tout licenciement pour atteindre les objectifs qui lui sont assignés en termes de suppression d’emplois. L’administration doit être informée sans délai de l’ouverture d’une négociation en vue de l’accord.
Cet accord doit prévoir le nombre maximal de départs volontaires envisagés, le nombre de suppressions d’emplois associées, et la durée de mise en œuvre de la procédure de rupture. Également les modalités de présentation et d’examen des candidatures au départ des salariés, comprenant les conditions de transmission de l’accord écrit du salarié au dispositif prévu. Il pose les conditions que doit remplir le salarié pour en bénéficier, ainsi que les critères de départage entre les potentiels candidats au départ. L’accord fixe les modalités de calcul des indemnités de rupture garanties au salarié, qui ne peuvent être inférieures aux indemnités légales de licenciement, et décide des modalités et conditions d’information du comité social et économique (CSE).
Des mesures visant à faciliter le reclassement externe des salariés sur des emplois équivalents doivent être prévues (formation, validation des acquis de l’expérience, reconversion, soutien à la création ou reprise d’activités par les salariés), ainsi que les modalités de suivi de la mise en œuvre effective de l’accord. En outre, l’accord doit déterminer « les modalités de conclusion d’une convention individuelle de rupture entre l’employeur et le salarié et d’exercice de droit de rétraction des parties » ainsi que « la durée pendant laquelle des ruptures de contrat de travail peuvent être engagées sur le fondement de l’accord ».
Il s’agit, en fixant précisément la date de la rupture, de respecter l’exigence de délai raisonnable au-delà duquel l’employeur ne peut pas accepter la candidature des salariés. L’acceptation par l’employeur de la candidature du salarié à la rupture conventionnelle collective emporte rupture du contrat de travail d’un commun accord des parties. On notera que le salarié ne peut rétracter son accord.
LE RÔLE DE L’ADMINISTRATION
Une fois conclu avec les syndicats représentatifs, l’accord est transmis en ligne à l’autorité administrative, dont relève l’entreprise ou l’établissement concerné (si le projet d’accord porte sur des établissements relevant de la compétence d’autorités différentes, le ministre du Travail désigne l’autorité compétente) qui s’assure, pour le valider, de sa conformité, du contenu des mesures et de la régularité de la procédure d’information du CSE. L’administration dispose d’un délai de 15 jours à compter de la réception de l’accord collectif pour notifier à l’employeur sa décision motivée de validation ou non. Le délai prévu court à réception du dossier complet par la Direccte. Le silence gardé par l’autorité administrative pendant le délai prévu vaut décision d’acceptation de validation. Dans ce cas, l’employeur transmet une copie de la demande de validation, accompagnée de son accusé de réception par l’administration, au CSE et aux organisations syndicales représentatives signataires. La décision de validation (ou, à défaut, notamment, les voies et délais de recours) est portée à la connaissance des salariés par affichage sur leurs lieux de travail ou tout autre moyen confé- rant une date certaine à l’information. En cas de refus de validation, l’employeur, s’il le souhaite, peut reprendre son projet et présenter une nouvelle demande après y avoir apporté les modifications nécessaires et informé le CSE, mais sans nouvelle négociation. Cette dernière mesure est dénoncée par les syndicats. À noter : pour les salariés protégés, la rupture du contrat dans le cadre de la rupture conventionnelle collective est soumise à autorisation de l’inspecteur du travail. Dans ce cas, elle ne peut intervenir que le lendemain du jour de l’autorisation.
SUIVI DE L’ACCORD
Le suivi de la mise en œuvre de l’accord portant rupture conventionnelle collective fait l’objet d’une consultation régulière et détaillée du CSE, dont les avis sont transmis à l’administration. Associée au suivi des mesures, celle-ci doit recevoir un bilan, établi par l’employeur. L’entreprise est aussi tenue de contribuer à des actions de revitalisation du ou des bassins d’emploi dans lesquels elle est implantée, lorsque les suppressions d’emplois résultant de l’accord en affectent, par leur ampleur, l’équilibre.