« Chaque année, nous perdons 100 campings ! »

2022 devrait être une très bonne année pour les campings en France. Depuis longtemps, ils constituent le premier hébergement estival touristique de l’Hexagone, et la pandémie a élargi encore leur clientèle. Pour autant, les campings doivent affronter plusieurs difficultés, dont la disparition de certains d'entre eux... Trois questions Nicolas Dayot, président de la FNHPA, Fédération nationale de l'hôtellerie de plein air.

(c)Adobestock
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2022, une grande année pour le camping en France ?

Nicolas Dayot : Nous allons réaliser une saison 2022 encore meilleure que celle de 2019. Cette dernière reste pour l'instant la plus intense de l'histoire du camping avec 129 millions de nuitées... Bien entendu, cette perspective se réalisera à condition que la guerre en Ukraine ne casse pas la dynamique actuelle, très favorable. Pour l'instant, la tendance est particulièrement bonne pour les réservations des mois d'avril, mai et septembre. Cela tient notamment à l'augmentation des séjours de courte durée. Pour l'été, la dynamique est moins spectaculaire, car les campings sont traditionnellement bien remplis à cette saison.

Globalement, l'ensemble des établissements bénéfice de cette évolution, quel que soit leur nombre d'étoiles. Et au niveau géographique aussi, la croissance est plutôt bien répartie, avec des évolutions qui vont de +10 à +30%. Cas un peu à part, la Corse et le Grand Est connaissent une croissance particulièrement forte, à la mesure de la baisse spécifique qu'ils avaient subie durant la pandémie. Par ailleurs, il est probable que les départements verts qui avaient connu une fréquentation inédite l'an dernier, comme les Vosges, le Jura, le Gers, le Lot, ou la Lozère, retrouvent au moins une partie de la clientèle nouvelle gagnée en 2021.

La pandémie, qui a fait découvrir le camping à certains Français, a-t-elle représenté un tournant important pour le secteur ?

Les campings sont traditionnellement le premier hébergement touristique estival en France, avec 23 millions de clients chaque année ! Depuis 20 ans, cette activité n'a pas cessé de progresser, et l'offre s'est considérablement améliorée, avec le développement d'hébergements premium qui concentrent une partie importante de la demande. Par ailleurs, cela fait déjà une quinzaine d'année que nous assistons à une transformation qui s'est encore renforcée avec les 35 heures. Les Français ont pris l'habitude de partir sur une période de l'année plus large : les ailes de la saison se sont rallongées. En particulier, l'automne est devenu une période très fréquentée, au point qu'on peut se demander si les campings, qui pour la plupart ferment en septembre, ne vont pas rester ouverts jusqu'à la Toussaint. La dynamique est spectaculaire.

Toutefois, la pandémie a joué un rôle en donnant aux Français l'envie d'aller à la campagne, de prendre l'air. Nous avons vu arriver une nouvelle clientèle CSP+ . Ne pouvant pas partir à l'étranger, elle a découvert le camping à cette occasion. Et il semble bien qu'elle soit revenue cette année. En effet, nous constatons que les locations haut de gamme se louent mieux que les emplacements nus. Cette clientèle souhaite qu'on la fasse rêver, par exemple avec des hébergements insolites.

Quels sont les freins au développement du camping ?

Plusieurs sujets très différents nous occupent aujourd'hui. C'est le cas du PGE (prêt garanti par l’État) pour lequel nous demandons un étalement du remboursement. Même si la plupart des campings ont moins souffert que les autres acteurs du tourisme, le remboursement tel qu'il est prévu remettrait en cause la capacité d'investissement des établissements, indispensable pour faire évoluer leur offre. S'ils n'investissent pas, ils risquent de perdre leur attractivité. La question de l'emploi nous occupe aussi : pour 2022, il nous manque encore 20 à 25% des ressources humaines nécessaires, en particulier dans la restauration et l'entretien ! Il ne s'agit pas encore d'une catastrophe, mais c'est déjà compliqué, notamment pour les petits établissements.

Nous allons donc mettre en place une plateforme de recrutement au niveau de la branche. Et enfin, le grand sujet de fond qui nous préoccupe est celui de la disparition de nos capacités d'accueil : chaque année, nous perdons 100 campings ! Certains sont de petits, municipaux, qui perdent leurs clients faute d'évoluer. D'autres ne le peuvent pas, en raison d'un cadre juridique très contraignant. De plus, il nous faut adapter les campings existants aux conséquences des changements climatiques à venir, comme par exemple la monté des eaux.

Nicolas Dayot. (c) Fédération nationale de l'hôtellerie de plein air.