Beauvais : « Nous devons combattre plus que les autres »
Nous sommes allés à la rencontre de Charles Locquet, maire adjoint « Plan d’action coeur de ville » de Beauvais. Il évoque les travaux menés actuellement, ses ambitions pour le commerce tout en restant lucide sur l’évolution des habitudes de consommation.
Pourquoi engager des travaux dans le centre ville de Beauvais ?
Charles Locquet : Pour participer à sa dynamisation. Il y a plein de raisons pour lesquelles les gens se rendent ou pas dans un centre ville. En priorité, ils veulent pratiquer le centre ville, être des usagers, y réaliser une activité, se balader, aller à la banque, y travailler, faire des démarches administratives. L’activité commerciale arrive en quatrième ou cinquième raison. Il est donc essentiel de créer des espaces apaisés, verts, élargis pour faciliter l’accès aux activités diverses et aux commerces. Nous travaillons sur des îlots de fraîcheur. Le centre ville est très minéral. C’est là où il fait le plus chaud. Nous allons planter des arbres à partir d’essences locales.
Quelle est sa caractéristique ?
Beauvais est une villes éloignée des grandes métropoles. Les consommateurs viennent des villages alentours. Notre slogan c’est : « Beauvais centre, tout le monde s’y retrouve ». C’est cela l’esprit des villes moyennes. On va connaitre des années compliquées mais si on ne fait rien, ça ne va pas s’arranger. Tous les deux/ trois ans, nous faisons des travaux. Ce ne sont pas les collectivités qui font l’économie mais elles se doivent d’accompagner les entrepreneurs car la dynamique est multiple. Il est important qu’ils se sentent soutenus. Ma mission, c’est celle là. Je suis heureux car nous sommes suivis par nos partenaires.
Vous allez piétonniser…
Il y a un effet la mise en place de terrasses dès qu’il fait beau. Dans la continuité de la place Jeanne-Hachette, rendue aux piétons il y a six ans, nous allons piétonniser 500 m de rue. C’était une demande de la part d’établissements existants, comme une boucherie qui va pouvoir organiser des dégustations, mais aussi de deux bars qui viennent de s’installer. Les travaux s’achèveront fin octobre. Nous les faisons sur une courte durée et par phase. On rendra des terrasses dès la fin mai.
Vous
vous êtes lancés dans un vaste programme d’animations…
Les animations, c’est la deuxième raison pour laquelle les gens se rendent dans le centre ville. Nous avons donc lancé un programme « 52 semaines, 52 animations ». Il va y avoir bientôt un marché nocturne, des jardins éphémères place Jeanne-Hachette cet été, un salon de la gastronomie… Il ne faut pas oublier que le centre ville concentre 15 000 habitants, soit le quart des habitants de la ville. Trois monuments du quartier épiscopal que sont la cathédrale Saint-Pierre qui va fêter l’an prochain ses 800 ans, le Quadrilatière et le MUDO sont en travaux. Le théâtre va rouvrir d’ici la fin de l’année. Cela participe aussi de la mutation et de l’attractivité du centre ville.
Comment s’y porte le commerce ?
Nous
comptons 400 établissements. On y trouve de tout. Le taux de
vacances est de 7, 5% ce qui est très peu. Sur les réseaux sociaux,
nous avons lancé une campagne de communication. Toutes les semaines,
nous dressons le portrait d’un commerçant. La seule solution,
c’est le pouvoir d’achat et la volonté d’acheter dans les
commerces de proximité. Si on commande depuis son canapé, il ne
faut pas s’étonner que certains ferment. Nous avons la chance
d’avoir comme locomotive les Galeries Lafayettes, ça reste encore
aujourd’hui une destination notamment pour les cadres. Nous
comptons aussi deux Carrefour.
Deux événements sont prévus après la rentrée…
En octobre, nous ouvrirons l’office du commerce et de l’artisanat. Ce sera un beau local avec différentes salles pour accueillir les porteurs de projets, les commerçants. Ce sera un lieu de discussions, d’échanges pour envisager ensemble l’avenir. En octobre encore, nous allons proposer une grande exposition sur le cœur de ville en montrant ce qui est fait aujourd’hui et ce qui va être fait demain. Nous avons encore des ambitions !
Le Jeu de Paume joue également un rôle important…
Le
centre commercial du Jeu de Paume abrite plusieurs grandes enseignes
comme Action, Leclerc, H&M, Le Furet. Quand il a ouvert il y a
dix ans, les commerçants avaient peur mais il répond à une
certaine demande. Il renforce l’attractivité du centre ville dont
il est éloigné de 200 m. Beaucoup de gens font le passage entre les
deux. Le taux de vacances des cellules commerciales au Jeu de paume
est de 30%. Les cellules sont aujourd’hui trop grandes. Mais
économiquement, ça tient. Il offre 750 places de parking gratuites
durant deux heures.
Le stationnement, c’est aussi un gage d’attractivité ?
À
Beauvais, ce n’est pas un problème. À n’importe quelle heure du
jour, il y a possibilité d’en trouver une. Nous venons de mettre
en place une zone bleue qui concerne 360 places de stationnement. La
ville offre 1h 30 de gratuités. Et c’est non payant le samedi, le
midi et le dimanche. Ceux qui ne veulent pas se garer en centre ville
peuvent stationner en périphérie. Les boulevards comptent quatre
parkings et les navettes sont gratuites.
Quel est le rapport entre commerce local et les zones commerciales ?
C’est complémentaire mais en ville on peut marcher, de profiter de l’espace. Beauvais est une ville à taille humaine. Nous travaillons tous ensemble. Les deux zones d’activités se trouvent à moins de dix minutes du centre ville. Elles sont vraiment complémentaires. Tout comme le centre ville, la périphérie souffre du manque de pouvoir d’achat.
Il y a donc une belle solidarité au niveau économique…
Oui,
il y a une solidarité, en engagement de territoire. On bosse sur
tous les sujets tout le temps ensemble. On ne lâche rien. Beauvais
est une ville de taille moyenne entre Amiens et Paris. Nous devons
combattre plus que les autres. C’est une ville agréable à vivre.
Nous avons une activité florissante mais on ne s’assoit pas sur
nos lauriers. Nous avons encore du foncier de disponible. La
commercialisation des 100 hectares de Novaparc débutera dans les
prochaines semaines. L’an prochain, le groupe AGCO va ouvrir son
show room. Nous allons devenir la capitale mondiale du tracteur !
Nous sommes une ville qui ne connaît pas trop de délinquance car
les communautés se parlent. On fait un beau centre ville aussi pour
les gens du quartiers. On a aussi de beaux équipements sportifs
comme au plan d’eau du Canada. Tout cela contribue au bien être
général.
Avec un grand naturel, vous aimez endosser de nouveaux rôles comme équipier dans un fast food et partager ces moments sur les réseaux sociaux…
Je
le fais avec grand enthousiasme. Je suis touché par les gens qui
s’engagent économiquement. J’ai grandi dans le quartier
Argentine dans une famille d’artisans. Je suis moi même
entrepreneur dans ce quartier. Je sais à quel point c’est dur de
faire vivre un commerce, une entreprise, de tout faire pour pouvoir
payer ses salariés à la fin du mois. Je me sens une responsabilité.
J’ai le goût de ça. Cela m’intéresse donc de pouvoir
accompagner ces gens au quotidien dès l’instant que je sens que je
peux servir à quelque chose. Des « Vis ma vie », j’en
fais régulièrement. Le quartier Argentine connaît un taux de
chômage de 25% chez les moins de 25 ans. Je veux pouvoir leur dire
« Va chez Mc do. Ils embauchent et je sais comment ça se
passe ». Il est important de comprendre comment la société
évolue. Dans tous les cas, moi, je reste positif.