En hausse, le nombre de défaillances d’entreprises reste en deçà de son niveau d’avant crise
Essoufflement de la création d’entreprises et hausse du nombre des disparitions et des radiations : après une année 2021 très dynamique, des signes de tension ont commencé à se manifester au premier semestre 2022.
Le constat dressé par le Baromètre national des entreprises, réalisé par l’institut d’études Xerfi à partir des bases de données des greffes des tribunaux de commerce, est sans appel. La guerre en Ukraine et ses conséquences économiques et la nouvelle dégradation de la situation sanitaire ont coupé l’élan de la reprise au premier semestre 2022.
Un contexte qui pèse sur l’économie française
Alors que les indicateurs économiques restent encourageants et que la majorité des secteurs sont optimistes quant à leur avenir, le contexte géopolitique et sanitaire « semble avoir sérieusement entamé l’optimisme des entrepreneurs français », explique le président du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce, Thomas Denfer, dans un communiqué. « Si l’heure n’est pas encore à l’emballement, l’inversion des courbes de la création d’entreprise et des défaillances, associée à une accélération des liquidations et radiations d’entreprises, pourraient être annonciateurs d’une crise économique profonde. »
Mais il est encore trop tôt pour savoir si les tendances observées depuis le début de l’année traduisent un retour « à la normale » aux niveaux d’avant la crise, du fait de la diminution progressive des aides publiques mises en place, ou si ces tensions sont l’amorce d’une crise plus profonde.
Création d’entreprises : l’élan enregistré en 2021 est retombé
Premier signe avant-coureur de ce qui pourrait être une forme d’essoufflement : la création d’entreprises, très dynamique, l’an passé, a enregistré au premier semestre 2022 une baisse de 10% par rapport à la même période de 2021. Le ralentissement est encore plus net pour les entreprises individuelles (dont les micro-entreprises) : les immatriculations ont diminué de 28 % sur le semestre. Mais la dynamique entrepreneuriale française reste néanmoins très positive puisque le nombre des créations d’entreprises (303 870) est actuellement supérieur à son niveau de 2019, c’est-à-dire d’avant crise.
Entreprises en difficulté : la situation se dégrade, mais on est loin du mur des faillites
C’est surtout du côté des entreprises en difficulté que la situation évolue depuis le début de l’année. Les ouvertures de procédures collectives ont augmenté de 45% par rapport au premier semestre 2021. Mais 2021 a été une année totalement atypique dans la mesure où le nombre de défaillances d’entreprise a été très faible, en raison des aides accordées par l’État. En dépit de la dégradation enregistrée ce premier semestre, les ouvertures de procédures collectives restent à un niveau bien inférieur à celui de 2019 (-23%). Les redressements judiciaires représentent 19,5% des ouvertures de procédures collectives et les liquidations 78%.
Toutes les régions ne sont pas concernées dans les mêmes proportions. L’Île-de-France est celle la moins touchée par cette reprise des ouvertures de procédures collectives, suivie de la Corse et des départements et régions d’Outre-mer, alors que le Sud-Ouest, le Nord-Est et la Bretagne enregistrent les plus fortes hausses des défaillances d’entreprises (+85% dans les Hauts-de-France / premier semestre 2021).
De fortes disparités sectorielles
Parmi les secteurs les plus touchés par les ouvertures de procédures collectives figurent des activités très fragilisées par la crise sanitaire et qui se sont maintenues grâce au soutien de l’État, telles que l’hébergement et la restauration (+97% au cours du premier semestre 2022), les services (+75%) et le commerce (+48%). D’autres secteurs, tels que l’enseignement, la santé et l’action sociale (+66%), ont au contraire été très porteurs pendant la crise (via des prestations en ligne) et semblent souffrir du retour à la normale.
Dans le secteur du transport et de l’entreposage, l’augmentation du nombre de défaillances (+57%) est très liée à sa forte croissance et à un turn-over structurellement élevé. Enfin, ce sont les services et commerces de proximité qui sont les plus affectés par les liquidations judiciaires, et en particulier, les soins de beauté, les commerces d’alimentation générale, la restauration traditionnelle, la boulangerie-pâtisserie, où elles ont plus que doublé à un an d’intervalle. Suivent, la restauration rapide, la coiffure et les débits de boissons.