Entreprises en difficulté : licenciements économiques
Licenciements économiques, plan de sauvegarde de l’emploi… revue de récentes décisions du Conseil d’État.
Redressement judiciaire : licenciements en période d’observation
Lorsqu’une entreprise est placée en période d’observation,
dans le cadre d’une procédure de redressement judiciaire, l’administrateur
judiciaire, qui ne peut procéder à des licenciements pour motif économique
qu’après autorisation du juge-commissaire, doit, si ces licenciements
concernent au moins dix salariés dans une entreprise d’au moins 50 salariés,
obtenir de l’autorité administrative, préalablement à la saisine du
juge-commissaire, l’homologation ou la validation d’un plan de sauvegarde de
l’emploi (PSE). (Conseil d’État, 22 mai 2019, n° 407401)
L’autorisation délivrée par le juge-commissaire de procéder
à des licenciements qui présentent un caractère urgent, inévitable et
indispensable, au cours de la période d’observation ne peut être prise que
durant cette période. L’administration ne peut légalement autoriser un
licenciement demandé sur le fondement d’une autorisation délivrée par le
juge-commissaire, si la période d’observation a expiré à la date à laquelle
l’employeur la saisit de sa demande (Conseil d’État, 12 juin 2019 n° 410987)
Demande d’homologation d’un PSE : qualité des signataires
Lorsqu’elle est saisie d’une demande de validation d’un
accord collectif portant PSE, il incombe à l’administration de s’assurer, d’une
part, de la qualité de ses signataires et, d’autre part, que le moyen tiré de
l’absence de qualité des signataires d’un tel accord peut être utilement
soulevé devant le juge de l’excès de pouvoir saisi de la légalité de la
décision de validation. Toutefois, le moyen tiré, non de l’absence de qualité
des signataires, mais seulement de ce que l’administration n’aurait pas procédé
à la vérification de cette qualité, est inopérant. (Conseil d’État, 12 juin
2019, n° 420084)
Demande d’homologation d’un plan de licenciement : contenu
Lorsqu’elle est saisie d’une demande d’homologation d’un
document qui fixe les catégories professionnelles au sein desquelles des
licenciements sont envisagés, il appartient à l’administration de se prononcer
sur la légalité de ces catégories professionnelles. Elle doit s’assurer, au vu
de l’ensemble des éléments qui lui sont soumis, notamment des échanges avec les
représentants du personnel au cours de la procédure d’information et de
consultation, ainsi que des justifications que l’employeur doit fournir, de ce
que ces catégories regroupent, l’ensemble des salariés qui exercent des
fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune.
Au terme de cet examen, l’administration refuse
l’homologation demandée s’il apparaît que les catégories professionnelles
concernées par le licenciement ont été déterminées par l’employeur, en se fondant
sur des considérations étrangères à celles qui permettent de regrouper les
salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle
commune (exemple : organisation de l’entreprise ou ancienneté des salariés). Ou
si une ou plusieurs catégories ont été définies dans le but de permettre le
licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en
raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression
est recherchée. (Conseil d’État, 22 mai 2019, n° 407401).
Demande d’homologation d’un document fixant le contenu d’un PSE
L’administration ne peut être régulièrement saisie d’une
demande d’homologation d’un document unilatéral fixant le contenu d’un PSE, que
si cette demande est accompagnée des avis rendus par le comité d’entreprise
(CE), ou, à défaut, si celui-ci est réputé avoir été consulté.
Lorsque la demande est accompagnée des avis du CE, la
circonstance que le comité d’entreprise (ou, désormais, le comité social et
économique, CSE) ait rendu ses avis au-delà des délais prévus est, par
ellemême, sans incidence sur la régularité de la procédure d’information et de
consultation du comité.
En l’absence d’avis du CE (ou du CSE), l’administration ne
peut légalement homologuer ou valider le plan de sauvegarde de l’emploi qui lui
est transmis que si, d’une part, le comité a été mis à même, avant cette
transmission, de rendre ses deux avis en toute connaissance de cause, dans des
conditions qui ne sont pas susceptibles d’avoir faussé sa consultation et que,
d’autre part, le délai prévu est échu à la date de cette transmission.
Enfin, si des modalités d’information et de consultation
différentes ont été fixées par un accord conclu sur le fondement de l’article
L. 1233-21 ou de l’article L. 1233-24- 1 du Code du travail, l’administration
doit s’assurer que le comité d’entreprise (ou le CSE) a été mis à même de
rendre ses deux avis en toute connaissance de cause, dans des conditions qui ne
sont pas susceptibles d’avoir faussé sa consultation. (Conseil d’État, 22 mai
2019, n° 413342).
Ordre des licenciements : critères
En l’absence d’accord collectif en ayant disposé autrement,
l’employeur qui procède à un licenciement collectif pour motif économique est
tenu, pour déterminer l’ordre des licenciements, de se fonder sur des critères
prenant en compte l’ensemble des critères d’appréciation suivants :
– les charges de famille (en particulier celle des parents
isolés) ;
– l’ancienneté de service dans l’établissement ou
l’entreprise ;
– la situation des salariés qui présentent des
caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle
particulièrement difficile (notamment, celle des personnes handicapées et des
salariés âgés) ;
– et les qualités professionnelles appréciées par catégorie.
Par suite, en l’absence d’accord collectif ayant fixé les
critères d’ordre des licenciements, le document unilatéral de l’employeur
fixant le PSE ne saurait légalement fixer des critères d’ordre des
licenciements qui omettraient l’un de ces quatre critères d’appréciation ou
neutraliseraient ses effets. Il n’en va autrement que s’il est établi, de
manière certaine, dès l’élaboration du Plan, que, dans la situation
particulière de l’entreprise et pour l’ensemble des personnes susceptibles
d’être licenciées, aucune des modulations légalement envisageables pour le
critère d’appréciation en question ne pourra être matériellement mise en oeuvre
lors de la détermination de l’ordre des licenciements. (Conseil d’État, 22 mai
2019, n° 418090).