« Le consommateur demande des produits traiteur aux prix abordables »
Quiche aux poireaux à déjeuner ? Les Français sont adeptes des plats préparés frais qu’ils consomment à la maison. Mais les entreprises du secteur sont prises en étau entre hausse de leurs coûts et pression de la distribution. De plus, elles peinent à recruter. Trois questions à Pascal Bredeloux, président de l'ETF, Entreprises du traiteur frais.
Que recouvre l’activité des entreprises du traiteur frais et comment évolue le métier ?
Aujourd’hui, les traiteurs frais en France sont principalement des PME et des ETI qui comptent une centaine de sites de production. Ils proposent une ensemble agroalimentaire très large avec par exemple saumon fumé, pâtes et soupes fraîches, salades prêtes à l’emploi, quiches, tartes et tourtes, humus et tarama...La spécificité du métier tient à la durée de vie des produits, à partir de leur date de production. Elle peut être d’un jour seulement jusqu’à une vingtaine pour des plats cuisinés comme une paella sous vide. Cela impose des mesures d’hygiène et des procédés de fabrication d’une extrême rigueur. Mais notre métier évolue : la durée de vie des produits est en train de diminuer, passant par exemple de 10 à 6 jours. En effet, avec des démarches comme le Nutriscore, on renonce à des conservateurs, par exemple. C’est aussi le résultat de l’évolution des emballage qui vise à réduire l’utilisation du plastique. Certaines marques adoptent des contenants végétaux ou en bois, ce qui contribue aussi à diminuer la durée de vie des produits.
Comment se porte l’activité, et combien répond t-elle aux modes de vie et aux attentes des Français ?
Pascal Bredeloux : Le chiffre d’affaires du secteur a atteint 5,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires, en 2022. La tendance est positive : par rapport à 2018, le chiffre d’affaires a augmenté de 23 %. Depuis des années, les produits traiteurs ont mieux résisté que les autres produits alimentaires de grande consommation aux crises que traverse la société. La pandémie, en particulier, a renforcé la tendance des Français à consommer à la maison des produits faciles et rapides à utiliser, mais aussi originaux, attrayants. Globalement, aujourd’hui, l’ensemble des familles de produits traiteur se portent bien, même si ceux bio, en particulier, suivent la tendance négative de ce marché. Sur un point, toutefois, la demande des consommateurs a changé. Longtemps, ils ont considéré les produits traiteurs comme des produits premium. C’est fini. Le consommateur demande des produits traiteur aux prix abordables. Les entreprises sont en train de s’adapter.
Récemment, vous avez alerté sur le danger que fait peser la hausse des prix du saumon sur les entreprises de fumaison. Quelles sont les difficultés communes à l’ensemble des traiteurs ?
Tous font face à des hausses des coûts et ne parviennent pas à les répercuter sur leurs prix. La distribution, s’y refuse. Certaines entreprises ont dû fermer ou ont été rachetées. Il semble que tous les problèmes s’accumulent... Les traiteurs font aussi face à d’autres types de difficultés, comme la disponibilité des camions, un sujet important pour les professionnels des produits frais. Nous avons aussi un souci de recrutement. Nos métiers impliquent de travailler dans des lieux où il fait froid, et les règles d’hygiène sont très contraignantes, il faut se laver les mains 50 fois par jour... Ce ne sont pas des conditions de travail très agréables. Par ailleurs, les machines, de plus en plus perfectionnées, nécessitent du personnel formé alors que l’agroalimentaire n’est pas considéré comme un métier très valorisant. En outre, le caractère saisonnier de notre activité complique encore le recrutement, à cause de la rigidité des contrats, de l’impact de la crise Covid et de l’inflation.