120e congrès des notaires de France

Urbanisme et développement durable, le défi du prochain congrès des notaires

Pour leur 120e congrès, en septembre, à Bordeaux, les notaires de France ont choisi, cette année, de se pencher sur l’accompagnement des projets d’urbanisme face aux réglementations et enjeux environnementaux.

(c)Adobestock
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« Le droit de l’environnement irrigue la totalité de notre droit en France », a rappelé Marie-Hélène Pero Augereau-Hue, notaire à Chevreuse (Yvelines) et présidente du prochain Congrès des notaires de France, lors de la présentation à la presse de cet évènement qui se tiendra du 25 au 27 septembre à Bordeaux. Le thème retenu pour cette 120e édition : « vers un urbanisme durable, accompagner les projets face aux défis environnementaux ». Et pour la première fois cette année, l’une des trois journées sera entièrement consacrée à la formation sur les questions liées à l’urbanisme et l’environnement.

« L’idée, c’est d‘anticiper et de convaincre pour réaliser autrement l’aménagement du territoire », a résumé la présidente du congrès, à l’issue de la présentation des grandes lignes du rapport – plus de 1 000 pages, fruit de deux années de travail – qui sera soumis à l’appréciation et au vote des notaires, en septembre. Le rapport contenant les propositions finalisées des trois groupes de travail – « anticiper », « convaincre » et « réaliser » – sera publié en juillet.

Mobiliser le notariat sur les questions environnementales

Pour la profession, « c’est le troisième congrès consacré à la question environnementale en 20 ans », a relevé Hervé de Gaudemar, notaire à Paris, et rapporteur général de ce congrès. Aujourd’hui, « dans son étude, le notaire est confronté à la complexité du droit de l’environnement et à de nombreux sujets sur lesquels il est en peine de répondre à ses clients, et cela le met mal à l’aise ». Aussi, si le travail accompli pour ce congrès vise, comme d’habitude, à faire émerger des propositions d’évolutions législatives et réglementaires qui seront transmises aux pouvoirs publics, il vise également « à mobiliser le notariat sur ces questions environnementales », qui sont « des sujets d’inquiétude qui se retrouvent dans nos études notariales et qu’il faut pouvoir traiter », a-t-il expliqué. « Nous voulons amener les notaires à modifier leur regard sur le droit de l’environnement » car « nous sommes dans un changement d’ère juridique qui nous amène dans un nouvel univers du droit », et « ce rapport est une mine d’informations sur des sujets d’une complexité extrême ».

Anticiper les risques et convaincre les acteurs locaux

Malgré « l’ampleur des informations, la législation peu lisible et souvent confuse », « nous devons apporter des réponses à nos clients, leur donner les bonnes informations pour qu’ils puissent faire les bonnes acquisitions et adapter leurs propriétés aux risques environnementaux », a déclaré Catherine Berthol, notaire à Strasbourg, et porte-parole de la première commission de travail, intitulée « anticiper ». Ses membres vont présenter des propositions concernant, notamment, la gestion des risques (inondations, tempêtes, gonflement-retrait des argiles, effondrements de terrain, recul du trait de côte…), l’assurabilité des biens et les méthodes d’indemnisation, la gestion des ressources (telles que l’eau), les friches et leur reconversion, la végétalisation…

Mais pour conduire un projet d’urbanisme aujourd’hui, il faut aussi réussir à « convaincre les acteurs locaux, voire nationaux, de la pertinence d’un projet car sa réussite passe par son acceptabilité », a poursuivi Antoine Urvoy, notaire à Lyon et président de la deuxième commission, baptisée « convaincre ». Les réflexions et les propositions de ce groupe de travail portent sur tous les dispositifs de concertation et de participation permettant aux élus d’impliquer les habitants et les associations dans ces projets à l’échelle d’un quartier, d’une ville ou d’une région, sur les dispositifs de consultation et de concertation entre élus locaux, sur la pratique des chartes promoteurs et des protocoles fonciers, sur la question des externalités positives d’un projet (qui peuvent prendre de multiples formes et ne sont pas réglementées), ou encore sur la problématique de l’évaluation de la valeur environnementale (labels, certifications…) et des autorisations environnementales.

Continuer de réaliser des projets d’urbanisme, oui, mais où ?

« Où, comment et à quelles conditions peut-on réaliser un projet aujourd’hui ? ». Telles sont les grandes lignes des questions sur lesquelles s’est penchée la troisième commission de travail, présidée par Michèle Raunet, notaire à Paris. En ce qui concerne le « où », la question est aujourd’hui « complètement liée au zéro artificialisation nette (ZAN), qui n’est que la suite logique de vingt ans de législation sur l’étalement urbain, après les lois SRU, Grenelle, ALUR et ELAN », a rappelé la notaire.

En dépit de ces nouvelles contraintes, « les possibilités sont très importantes avec les friches et toute une série d’espaces existants qui sont le réceptacle possible de projets d’urbanisation, des lieux qu’il faut appréhender pour pouvoir les transformer ». Premier exemple : « Les zones pavillonnaires sont des sources très importantes de création de logements, mais aussi de services et de commerces pour faire vivre ces zones ». Autre exemple : « Les entrées de villes. Ces zones ont la particularité de comporter de vastes parkings qui ne demandent qu’à être transformés en zones de renaturation, de logements, de services… »

Continuer de réaliser des projets d’urbanisme, oui, mais à quelles conditions ?

En parallèle, la question du « comment » transformer a énormément évolué ces dernières années. « Il faut de plus en plus s’interroger sur la qualité environnementale des ouvrages, avec, depuis une quinzaine d’années, une multitude de normes qui imposent un certain nombre de règles aux porteurs de projet », a poursuivi Michèle Raunet. Autre évolution très importante : « Nous sommes en train de passer d’un urbanisme de la construction à un urbanisme de la transformation. On va de moins en moins pouvoir démolir et on va de plus en plus devoir transformer. Or, la transformation n’est pas encore totalement appréhendée dans nos textes – dans le Code de l’urbanisme, le Code de la construction et de l’habitation, le Code de l’environnement, dans le Code général des impôts… »

La commission a notamment travaillé sur la question du foncier et des enjeux de la détention du foncier, « qui est un bien commun et un bien rare aujourd’hui, ce qui pose la question du démembrement de propriété pour pouvoir développer la ville et lui permettre de se régénérer », et sur la problématique des recours contre les autorisations d’urbanisme. « Cela fait 30 ans que l’on cherche des solutions pour réduire les recours, mais les notaires continuent de passer des actes avec des conditions suspensives de permis de construire définitif, alors même que l’on sait que l’issue d’un recours avec une annulation de permis et une démolition est quelque chose de totalement marginal. Cela, le notariat n’a pas su s’en saisir et nous allons essayer de les convaincre de s’en saisir. »