Finances
Sortie de crise : 52 propositions des députés pour mieux accompagner les entreprises
Avant que le Gouvernement acte la fin du « quoi qu’il en coûte », la mission d’information commune de l’Assemblée nationale sur les entreprises en difficulté du fait de la crise sanitaire, a publié cet été, après sept mois de travaux, son rapport. Il contient 52 propositions, dont de nouvelles réformes du droit des entreprises en difficulté.
« C’est une boite à outils essentielle pour passer le cap de la crise », a expliqué le 21 juillet dernier le député LREM, Romain Grau, lors de la présentation du rapport de la mission d’information qu’il a présidée, devant la commission des Affaires économiques, la commission des Lois et celle des Finances de l’Assemblée nationale. Soit 52 propositions « qui s’adressent en priorité aux PME et TPE » et dont les pouvoirs publics sont invités à s’inspirer pour mieux accompagner les entreprises en sortie de crise.
Éviter une dé-perfusion trop brutale de l’économie
Le premier grand axe de ces propositions vise à « anticiper la sortie du dispositif de crise, afin d’éviter une dé-perfusion trop brutale de l’économie », a poursuivi le député. Le rapport préconise ainsi de lever progressivement les mesures de soutien aux entreprises et de maintenir, au cas par cas, les aides qui ne créent pas d’endettement pour les entreprises, d’encourager le recours au dispositif d’activité partielle de longue durée, de permettre l’allongement de la durée d’amortissement des PGE (prêts garantis par l’État) au-delà des six ans (jusqu’à dix ans au maximum) et l’échelonnement du recouvrement des prélèvements obligatoires, et de raccourcir les délais de paiement pour préserver les capacités de trésorerie, en particulier des PME.
Autant de mesures qu’il convient d’appliquer au cas par cas. « On ne peut pas sauver tout le monde », a-t-il relevé, mais « si c’est le fait covid qui a entraîné une fragilisation de l’entreprise, cette entreprise mérite d’être sauvée ». La mission suggère d’isoler « le fait covid » et ses conséquences économiques, dans une annexe au bilan et au compte de résultat de l’entreprise.
Créer un « tribunal des entreprises »
Autre grand axe des propositions de la mission : améliorer la détection et l’accompagnement des entreprises en difficulté. Pour ce faire, le rapport préconise de rassembler tous les acteurs de la prévention autour d’une gouvernance territoriale modernisée et de mobiliser davantage les partenaires de l’entreprise. À commencer par les experts-comptables, en prévoyant une obligation d’alerte, non pas auprès du tribunal mais auprès du dirigeant, un entretien obligatoire entre le chef d’entreprise et l’expert‑comptable, dès que ce dernier ne perçoit plus d’honoraires, et la possibilité pour le professionnel du chiffre d’effectuer un signalement auprès du tribunal à l’issue de cet entretien.
Les rapporteurs suggèrent également de créer un « tribunal des entreprises » en faisant évoluer les compétences du tribunal de commerce, « qui serait compétent pour l’ensemble des entreprises quelle que soit leur activité », a expliqué Romain Grau, et « qui n’aurait plus à connaître du contentieux des sanctions », transféré au tribunal judiciaire. « Ce serait une mesure de simplification et de pédagogie particulièrement bienvenue et qui permettrait de donner tout son sens à l’expression ‘se placer sous la protection du tribunal’ ».
Réformer à nouveau le droit des entreprises en difficulté
Le rapport invite aussi les pouvoirs publics à « renforcer l’efficacité des procédures collectives pour les rendre plus souples et plus adaptées aux besoins de l’économie », a poursuivi le député. « Nous avons donc mené une réflexion sur la nécessité de faire évaluer à nouveau le droit des entreprises en difficulté », mais « nul besoin d’envisager un grand soir » pour autant. « Si les fondamentaux du droit des entreprises en difficulté doivent être conservés, la crise a mis en lumière un certain nombre de failles structurelles de ce droit, avec globalement des procédures trop lourdes, trop longues et éprouvantes pour l’ensemble des parties prenantes ». Le rapport propose, notamment, d’améliorer l’attractivité des procédures amiables en encadrant davantage leur coût et en modernisant la procédure de conciliation, d’élargir le bénéfice de la procédure simplifiée de sortie de crise à l’ensemble des PME, de permettre une saisine plus rapide du tribunal, d’écourter les délais de la période d’observation et de « lever certains obstacles procéduraux à la réussite du sauvetage de l’entreprise ».
Enfin, le dernier grand axe des propositions vise à faciliter le rebond du chef d’entreprise. Il s’agit, en particulier, de procéder à un traitement accéléré de la liquidation lorsque aucune autre solution n’est possible, d’autoriser (sous conditions) la reprise par le dirigeant, de garantir un véritable droit à l’oubli pour les chefs d’entreprise et de renforcer la protection des biens personnels du dirigeant.
Le comité de sortie de crise, qui s’est réuni la première fois le 22 juillet dernier, a d’ores et déjà fait savoir qu’il allait étudier l’ensemble de ces propositions.
Entre 20 000 et 25 000 entreprises en sursis
Selon le rapport de la mission d’information commune de l’Assemblée nationale sur les entreprises en difficulté du fait de la crise sanitaire, entre 20 000 et 25 000 entreprises françaises seraient actuellement « en sursis », car maintenues à flot grâce aux dispositifs de soutien gouvernementaux. Les défaillances d’entreprises ont en effet enregistré une baisse radicale depuis le début de la pandémie (- 40% en 2020 par rapport à 2019). Plus d’un million de salariés ont été concernés par l’activité partielle, 685 000 entreprises ont bénéficié des prêts garantis par l’État (139 milliards d’euros de prêt accordés) et 2 millions d’entreprises ont eu droit au Fonds de solidarité (33 milliards d’euros d’aide versés). Entre mars et septembre 2020, environ 2,4 millions d’entreprises ont utilisé les reports de cotisations de sécurité sociale.